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Dubaï ... l'envers du rêve immobilier

Publié le 12 avril 2006

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Il n'y a que 13 ans, s'étendait encore le désert, là où maintenant les gratte-ciels fleurissent. Mais au-delà de ce printemps de Dubaï s'étend Sonapour, un camp délabré et surpeuplé où s'entassent des milliers d'Asiatiques qui travaillent sur les gigantesques chantiers immobiliers de l'émirat.
Dubaï ... l'envers du rêve immobilier - Batiweb
Sonapour, "le lieu doré" en Hindi, était jadis un cimetière. Situé dans une zone désertique en dehors de Dubaï, c'est aujourd'hui une suite de baraquements renfermant plus de 150.000 travailleurs, essentiellement indiens et pakistanais, selon une organisation indienne basée aux Emirats arabes unis.

"Bienvenue dans ce camp délabré", lance en souriant Ghoulam Moustafa, 35 ans, à l'entrée du bloc de 35 chambres qu'il partage avec quelque 600 autres ouvriers. Derrière un portail en métal abîmé peint en orange, des dizaines d'hommes sont assis dans une cour où s'amoncellent meubles brisés et sacs de détritus.

Dans cette structure d'un étage, des pièces d'environ 3,6 m x 3,6 m se suivent le long d'un couloir sombre et humide. La nourriture est préparée sur des réchauds connectés à des bonbonnes de gaz.

Niaz Hussein, 24 ans, partage une chambre avec 14 personnes. La plupart dorment à même le sol, la pièce ne contenant que deux lits. Né dans la province pakistanaise du Sindh (sud-est), il vit à Dubaï depuis treize mois, faisant de menus travaux pour survivre et surtout subvenir aux besoins de sa femme, sa fille et ses parents restés au pays. Il touche 4 dirhams par heure (1,10 dollar). Avec un peu de chance, il peut gagner jusqu'à 1.000 dirhams par mois, dont 342 serviront à sa nourriture et son loyer et à rembourser les frais de l'agence de recrutement qui lui a procuré le permis de travail. Ces frais peuvent atteindre jusqu'à 12.000 dirhams.

Il travaille à la construction d'une route mais n'a pas été payé depuis plus d'un mois. "C'est insupportable. Je n'arrête pas de me demander comment ma famille survit", déclare-t-il.

La situation des travailleurs asiatiques aux Emirats a été de nouveau étalée au grand jour après une grève de 48 heures de 2.500 d'entre eux qui ont manifesté en mars sur le site de construction de "Burj Dubai". Certains ont même saccagé des véhicules et du matériel, une première. Projet phare de la compagnie Emaar, société immobilière contrôlée par le gouvernement de Dubaï, "Burj Dubai", qui devrait culminer à plus de 700 mètres (sa hauteur exacte est un secret), sera la tour la plus haute du monde.

L'employeur des ouvriers, Al-Naboodah Laing O'Rourke, une compagnie émirato-britannique, a mis l'incident sur le compte d'un "manque d'information" et de "l'incompréhension". Emaar s'est bornée à dire que la construction de la tour n'avait pas été affectée. Le responsable des affaires sociales et du travail au consulat indien à Dubaï, B.S. Moubarak, affirme recevoir au moins dix plaintes par mois, la plupart concernant le non-versement ou des retards de salaires. Les Indiens et les Pakistanais représentent près de 45% des quelque quatre millions d'habitants des Emirats, contre 20% à peine pour les Emiratis.

Après les incidents de "Burj Dubai", l'organisation Human Rights Watch (HRW) a appelé le gouvernement à "cesser les pratiques abusives" contre les travailleurs étrangers et a jugé "inhumaines" leurs conditions de travail. Le ministre émirati du Travail Ali al-Kaabi a qualifié le rapport de HRW de "démentiel".

Depuis 2005, les grèves sauvages se sont multipliées à Dubaï, où droit de grève et syndicats n'existent pas. "Le problème est très sérieux", affirme K. Kumar, 57 ans, chef du Comité d'assistance sociale de la communauté indienne. "Pour contenir la situation, elles (les autorités) doivent accorder plus d'importance à ces questions".

Les troubles éclatent généralement lorsque les sous-traitants se trouvent en difficulté financière ou ne sont pas payés à la date prévue. "Les ouvriers sont le dernier maillon de la chaîne et sont donc les plus durement touchés", explique M. Kumar.

Conscients de la gravité de la situation et de l'impact négatif que ce problème pourrait avoir sur l'image de la ville, les autorités ont créé l'an dernier une commission chargée de résoudre ces conflits.

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