Travaux publics : la FNTP affiche ses propositions pour les européennes
Après la CAPEB et la FFB, place aux propositions de la Fédération Nationale des Travaux Publics (FNTP) à l’approche des élections européennes. Celles-ci s’inscrivent dans le manifeste diffusée par la Fédération de l’industrie européenne de la construction (FIEC).
La fédération se concentre sur deux grandes priorités : d'un côté, décarboner et soutenir les transitions écologique des travaux publics, de l'autre, accompagner les entreprises en ce sens.
Transition écologique des TP : des investissements à muscler
« Les Travaux publics jouent un rôle déterminant pour faciliter la réussite de la transition écologique », défend la FNTP. « En effet, les infrastructures constituent le socle permettant le développement des mobilités propres : les transports en commun, le transport ferroviaire et la décarbonation de la route (qui représente plus de 85 % des déplacements en France). Elles contribuent, par ailleurs, à la lutte contre les pollutions, le bruit et participent à la préservation de la ressource en eau », développe-t-elle.
Pourtant, la fédération avance un sujet de taille à l’échelle européenne : les investissements. Pour atteindre la neutralité carbone visée d’ici 2050, plus de 1 500 milliards d’euros d’investissements seraient nécessaires à l'égard de l’UE. Dans le sens de la transition écologique et numérique, un cadre financier 2028-2034 doit être défini.
La FNTP salue quand même quelques innovations durant la mandature 2019-2024. On relève le Plan de relance européen, qui comprennent des plans de relance nationaux. Sans compter l’initiative « Global Gateway », en faveur des transitions numérique, énergétique et écologique dans les pays émergents et en développement, dont découlent 300 milliards d’euros de financements européens d’ici à 2027. Tout cela pour « soutenir le financement d’infrastructures soutenables et de qualité, dans le respect des normes sociales et environnementales ».
L’organisation appelle toutefois au déploiement de chantiers mobilités. « Ces projets d’intérêt européen ciblés en faveur de la décarbonation (dans le cadre du réseau transeuropéen de transport) pourraient ainsi reposer sur une mobilisation d’acteurs multi-niveaux avec une combinaison d’instruments financiers (subventions, garanties et prêts) », justifie-t-elle.
Lesdits projets d’intérêt européen doivent inclure l’entretien des infrastructures, tant pour capitaliser sur l’existant et que pour éviter de nouvelles opérations d’artificialisation des sols. « La régénération et l’entretien des réseaux routiers et ferroviaires, des ouvrages d’art et des réseaux d’eau potable souffrent depuis plus d’une décennie d’un sous-investissement chronique en Europe. L’effondrement du pont de Gênes en 2018 a illustré l’ampleur du vieillissement des infrastructures, une situation qui concerne l’ensemble des pays européens », est-il détaillé par la FNTP.
Accompagner les entreprises face à la taxonomie européenne
Autre pierre angulaire de la politique bas carbone européenne : la taxonomie. Pour rappel, elle est née d’un texte publié en juin 2020 et établit des règles de transparence sur les marchés financiers en matière d’investissements durables. D’ailleurs un texte sur le label vert incluant le gaz et le nucléaire parmi les investissements éligibles, avaient fait débat en 2022.
Côté FNTP, on soutient surtout une « bonne appropriation pratique » de la taxonomie européenne par les entreprises de travaux publics. Elle demande notamment de « promouvoir le financement, par la sphère financière, des actions en faveur de la transition vers une économie décarbonée et non des seules activités vertes. La taxonomie devrait davantage prendre en considération l’évolution des usages et l’amélioration des techniques de construction ».
La fédération mise sur la création d’une « méthode européenne commune et comparable », pour calculer les émissions lors de la construction et sur l’ensemble du cycle de vie du bâti. « L’implication des entrepreneurs devrait être encouragée, durant la phase conception en facilitant le passage aux contrats type « design and built » ou bien en autorisant, par principe, les variantes, notamment les variantes environnementales », lit-on dans leur communiqué.
L’organisation encourage également un programme dédié au secteur de la construction, mettant l’accent sur l’innovation, les nouvelles technologies, le recours aux matériaux bas carbone.
« Alléger l’édifice réglementaire »
Ce qui nous amène à une préoccupation plus globale de la FNTP : le cadre législatif, trop lourde, voire contradictoire pour les entreprises. « En mars 2023, la présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, a annoncé une réduction de 25 % des obligations de déclaration pour les entreprises — des règles qui obligent les entreprises à remplir des formalités et qui drainent leurs ressources », évoque notamment l’organisation.
Sans compter le Green Deal, avec plus de 70 textes proposés et adoptés rien que sur la seule mandature 2019-2024. Elle est d’ailleurs l’une des raisons de la révolte des agriculteurs en début d’année. « Si la mandature était consacrée à l’établissement de règles, il s’agit désormais de s’assurer de leur mise en oeuvre pour cette nouvelle législature (d’autant plus que les autorités françaises tendent souvent à surtransposer les lois européennes – voire à anticiper les textes européens à venir, ce qui entraîne un hiatus entre la législation européenne et la législation française). Une pause réglementaire s’impose donc, pour permettre aux entreprises d’assimiler la législation découlant du « Green Deal » », plaide la FNTP.
Plus de souplesse, différer la mise en oeuvre de la directive… Voici une partie des requêtes de la fédération sur la question. Elle demande à ce que la production de nouvelles normes soit restreinte, notamment avec une généralisation de la règle « One In, One Out ». C’est-à-dire que « toute nouvelle norme doit être compensée par la suppression, ou en cas d’impossibilité avérée, la simplification d’au moins deux normes existantes ». Le représentant des entreprises de travaux publics appelle également à limiter la législation secondaire - actes délégués et actes d’exécution -, pour plus de sécurité juridique au sein de ces structures.
Le renforcement de l’outil « test PME » est également un enjeu important pour la FNTP. Ce dispositif, lancé en septembre 2023, permet de mesurer l’impact des propositions législatives et réglementaires sur les PME, et ainsi leur éviter des coûts supplémentaires dommageables à leur développement.
Virginie Kroun
Photo de Une : Adobe Stock