Nuisances lumineuses : les propositions du secteur de l’éclairage pour une réglementation efficace
En l’état, les actions prévues « ne sont pas suffisantes pour lutter efficacement contre la pollution lumineuse ». Les acteurs du secteur pointent notamment le fait que les mesures portent uniquement sur l’éclairage public. Or, une étude menée en 2018 par la Ville de Paris souligne que l’éclairage privé représente 58% des lumières excessives émises la nuit sur son territoire contre 35% par le domaine public et 7% par les véhicules. Sur le domaine public, 52% des points chauds sont émis par l’éclairage public, le reste provenant du mobilier urbain, des terrasses de café, etc., précisent-ils.
Un manque d’adéquation entre exigences techniques et spécificité des installations
Les syndicats estiment également que certaines exigences techniques du projet d’arrêté sont inadéquates au regard de la spécificité des installations. « L’application systématique du code Flux CIE n°3 dans les conditions d’installation reviendrait à utiliser des « cônes » de lumière dont l’ouverture peut être incompatible avec l’obtention de l’uniformité de l’éclairage au sol, indispensable à la bonne perception visuelle des usagers, sauf à multiplier le nombre de points lumineux », disent-ils.Ils poursuivent : « La valeur proposée de 0% pour la proportion de lumière émise par le luminaire fonctionnel au-dessus de l’horizontale (ULR) n’est pas forcément compatible avec l’aspect nocturne recherché en milieu urbain ». Ils proposent de laisser à l’appréciation du maître d’ouvrage, une valeur limite maximum de 4%.
Concernant les valeurs limites de flux lumineux installé retenues, elles sont trop « restrictives » et « doivent être compatibles avec les besoins des usagers » (définis dans la norme NF EN 13201) et a minima les réglementations accessibilité en vigueur alors que la France compte 5 millions de travailleurs de nuit et 1,7 millions de personnes malvoyante.
« Pour assurer la sécurité des déplacement, les zones de conflit de mobilité, définies par le maire sur son territoire, doivent pouvoir faire l’objet d’un traitement spécifique, notamment un éclairage de température de couleurs plus élevé que celui préconisé, allant jusqu’à 4 000 K », des LED qui ont une efficacité lumineuse supérieure de 63% aux LED de 2 200 K, avancent-ils.
« Nos solutions et préconisations visent à répondre aux exigences tout en assurant la sécurité des déplacements. Le véritable enjeu aujourd’hui est la vitesse de rénovation du parc existant », déclare Julien Arnal, Président du Syndicat de l’éclairage.
Une réglementation attendue
Bien que des évolutions soient nécessaires, les syndicats soutiennent « l’ambition d’arrêté qui vise à fixer les prescriptions techniques concernant la conception et le fonctionnement de tous les luminaires d’éclairage extérieur et l’engagement des pouvoirs publics dans sa volonté de modernisation du parc d’éclairage ». « Appelons à une prise de conscience collective pour intégrer l’ensemble des sources de nuisances lumineuses dans la réglementation ».Ils soulignent que les collectivités locales ont d’ores et déjà engagé cette transition : elles ont notamment réduit la durée de fonctionnement de l’éclairage de 12% depuis 1990 pour atteindre aujourd’hui 3 600 heures en moyenne annuellement (estimation AFE).
« Pour continuer à pouvoir réaliser des ambiances lumineuses vertueuses, efficaces, soucieuses de la biodiversité mais aussi belles, apportant une vraie identité nocturne à chaque espace public, nous demandons de pouvoir continuer à utiliser ponctuellement de la lumière colorée pérenne dans nos projets urbains », souligne Virginie Nicolas, Présidente de l’Association des Concepteurs lumière et Éclairagistes
Les progrès doivent bien sûr se poursuivre : l’obsolescence d’une grande partie du parc installé (plus des 2/3 du parc a plus de 10 ans) doit « inciter à prendre des mesures non seulement sur les nouvelles installations, mais surtout sur celles qui contribuent actuellement le plus à ces nuisances ».
Les acteurs de l’éclairage précisent enfin qu’ils seront prêts au 1er janvier 2020 pour poursuivre et accélérer la rénovation des installations et accompagner les collectivités dans ces évolutions. Ils regrettent l’absence d’annonce de la part du gouvernement pour accompagner financièrement les communes, comme en 2012, où l’Ademe proposait un abondement pour accélérer les rénovations.
« Cette absence d’annonce de l’État ne peut se compenser par la création d’une fiscalité écologique locale, prônée par certaines parties prenantes : dans le rapport actuel des Français aux taxes, fussent-elles au service de l’environnement, cette fiscalité serait d’autant moins comprise », conclut le communiqué.
R.C
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