Naissance du « Cement Lab », un outil au service de l'innovation
Le lieu de lancement n’a pas été choisi au hasard : le SFIC souhaitait en effet présenter l’initiative dans un lieu qui fasse la part belle au matériau béton. « Station F est un lieu hautement symbolique tant par son histoire que par ce qu’il représente en matière d’excellence de la construction française », a expliqué Bénédicte de Bonnechose, présidente du syndicat.
Plus grand incubateur de start-up du monde, Station F est installé dans l’ancienne Halle Freyssinet, un bâtiment ferroviaire révolutionnaire en son temps par son volume et son usage inédit du béton, élément indissociable du ciment. « Le béton est un matériau incontournable pour construire des bâtiments, des infrastructures. Il est conçu pour durer et se transformer au fil du temps et s’adapter à l’évolution des usages », a souligné Mme de Bonnechose.
Pour illustrer cette capacité d’adaptation, la présidente du SFIC est revenue sur la crise de 2007 qui a touché de plein fouet l’industrie du ciment. « La crise a induit une profonde mutation de nos marchés et a conduit notre industrie à se transformer. Elle s’est mobilisée pour répondre aux enjeux du carbone et de l’économie circulaire ».
Depuis longtemps, les cimenteries « utilisent des procédés de traitement de déchets qui allient à la fois valorisation énergétique, c’est-à-dire substitution des combustibles fossiles par des déchets, et valorisation de matières (recyclage des minéraux dans la matière première ciment) ».
Aujourd’hui, c’est « pour aller plus loin » que le SFIC a présenté une « démarche tournée vers l’innovation ». Le Cement Lab est « le symbole d’une démarche d’ouverture vers un écosystème » connectant les jeunes entreprises innovantes et le monde de la recherche académique à celui de l’industrie cimentière.
Ce laboratoire nouvelle génération va permettre de développer « une dynamique d’échanges et de rencontres. Ce que nous voulons proposer, c’est une façon de réfléchir autrement pour faire émerger de belles opportunités d’innovation car l’innovation, nous allons en avoir besoin pour répondre à l’exigence de la transition énergétique et aux enjeux du climat », a estimé Mme de Bonnechose.
Il est également « l’opportunité pour l’industrie cimentière de mieux répondre aux besoins de la maîtrise d’œuvre et d’ouvrage » et de mieux comprendre les transformations de ses marchés, avec l’objectif d’adapter, à terme, ses métiers.
Quelles sont les attentes des constructeurs ?
Jérôme Stubler, président de Vinci Construction, était invité au lancement du laboratoire. Il s’est félicité de cette initiative : « Nous sommes très contents de voir que l’Open Innovation arrive aussi dans un domaine assez protectionniste comme celui des cimentiers ».S’adressant aux industriels et aux start-ups présents, il a rappelé que l’innovation était faite « d’expérience et d’intuition ». Il a également souligné l’importance d’une plus grande collaboration sur toute la chaine de valeur : « C’est en décloisonnant cette chaine que l’on va trouver des innovations plus fortes ».
« Je suis pour la création d’un équipe de France de notre industrie. Soyons ambitieux pour franchir de nouvelles étapes. Nos anciens ont inventé la pierre liquide, inventons le béton sans acier. Nous n’avons utilisé les capacités chimico-physiques et industrielles du béton qu’à 20% ».
Bien que représentant Vinci, Jérôme Stubler a formulé des propositions au nom des constructeurs. Il a tout d’abord regretté que le béton souffre d’une image un peu négative. « Nous devons œuvrer tous ensemble à améliorer l’image du béton et pour cela, il faut avant tout diminuer l’empreinte carbone de matériau ».
Il a notamment déclaré qu’il fallait faire en sorte de mettre « moins de ciment dans le béton. Vendez-nous du ciment plus stable, plus rigoureux, plus formidable dans ses applications. Transformez votre industrie de masse en industrie de niche » a-t-il conseillé aux cimentiers.
Jérôme Stubler a enfin appelé les cimentiers à « dépoussiérer l’industrie, à débloquer les normes qui sont un frein à la créativité ». Il s’est également adressé aux pouvoirs publics en demandant à ce que soit remis en place la possibilité « de réaliser des ouvrages expérimentaux ».
L’innovation collaborative
Pour faire évoluer l’industrie, le « Cement Lab » va s’appuyer sur les start-ups du secteur de la construction. L’événement de ce jour a ainsi compté sur la présence de 5 jeunes entreprises innovantes parmi lesquelles XtreeE et AirWare (anciennement RedBird).Etaient aussi invités Combo Solution qui développe un outil et une méthode à destination des concepteurs et des constructeurs pour favoriser la créativité autour d'objectifs énergie et carbone qualifiés et partagés ; 360 Smart Connect qui imagine le béton connecté pour lier l’ouvrage à ses datas, et dans le même temps aux services qui permettent notamment d’interagir avec ces données, et Smart Cast qui propose des plaques de coffrage qui remplacent les contre plaqués bakélisés traditionnels, en apportant de nouvelles fonctionnalités inédites au coffrage.
Le Cement Lab se veut également l’occasion pour l’industrie cimentière de collaborer avec le monde académique. La science peut en effet aider les entreprises à répondre plus efficacement aux enjeux de la transition écologique et à optimiser des procédés de fabrication.
La démarche lancée ce jour sera pérenisée à travers des rencontres : la prochaine aura lieu d’ici septembre 2018.
Rose Colombel
Photo de une : ©Rose Colombel