« Le bâtiment peut être un secteur excellent et épanouissant pour une femme »
Batiweb : Comment êtes vous arrivée à la direction d'Akabois ?
Géraldine Kerdilès : J'ai d'abord validé une licence administration des entreprises et management à Brest puis j'ai fait l'école supérieure de commerce de Marseille. Je suis également partie au cours de mes études, à Londres et en Australie. Mon objectif était de m'orienter vers le marketing international, mais mon père est tombé malade et le repreneur initial de l'entreprise familiale s'est désengagé presque en même temps. Je cherchais un premier stage ou un premier job et je lui ai alors proposé de le remplacer pendant cinq mois. J'ai démarré dans l'entreprise et le métier m'a tout de suite plu. On peut dire que je suis tombée dedans... à l'âge de 25 ans.
Vous êtes désormais à la tête de l'entreprise de votre père, est-ce que cela a été difficile de s'imposer en tant que femme ?
G.K : J'ai eu une chance énorme à mon arrivée, celle de travailler avec une équipe jeune. J'ai donc été naturellement bien accueillie, malgré mon statut de femme et de fille du patron. Vingt personnes travaillent avec moi, qui sont très motivées pour développer l'entreprise. J'ai bénéficié à la fois de leur savoir et de l'expérience de mon père. En arrivant, je ne connaissais en effet rien à la technique et je devais faire mes preuves. J'ai appliqué les choses que j'avais apprises à l'école, réalisé une analyse de marché de la maison en ossature bois, et pointé les forces et les faiblesses de notre entreprise. J'ai réalisé que nous ne répondions qu'à 30 % au marché des primo-accédants. C'est pourquoi, nous avons réorienté notre politique vers une optimisation des coûts. Nous avons opté pour le plan type, réduit au maximum les pertes et les déchets lors de la construction. Il fallait à tout prix arriver à une maison de qualité, moins chère et concurrentielle par rapport à la maison traditionnelle en parpaing. Une fois que nous y sommes arrivés, certains avaient des réticences à la vendre car une maison sur plan type disposait d'une image encore péjorative, celle d'une maison sans création. Finalement, j'ai pris mon bâton de pèlerin et je suis allée la vendre moi-même. Et cette gamme a bien fonctionné, ce qui a convaincu le reste de l'équipe. La première année, nous avons réalisé + 30 % sur notre chiffre d'affaires, une belle réussite. Grâce à cela, nous avons modernisé l'atelier de fabrication afin de doubler nos capacités de production, en passant ainsi de 15 maisons par an à une quarantaine aujourd'hui.
Vous avez remporté le Trophée de la Femme Repreneur du BTP, est-ce que vous vous y attendiez ?
G.K : C'était une belle surprise car je suis encore jeune dans le métier. C'est la bonne occasion de montrer qu'une femme dans le bâtiment ça fonctionne aussi et peu importe l'âge. Pour reprendre une entreprise du bâtiment, je pense qu'il faut être au moins deux, l'un apportant son expérience à la génération suivante. Mon père m'a donné son expérience, ses connaissances et son carnet d'adresses... et nous avons réussi ensemble à faire avancer l'entreprise. Le bâtiment peut être un secteur excellent et épanouissant pour une femme, dans lequel elles peuvent réussir. Je rencontre au quotidien de belles personnes et je trouve que la technique est quelque chose de passionnant, car elle est en constante évolution. De nouvelles normes arrivent, de nouveaux concepts, il y a toujours quelque chose à apprendre dans ce métier.
Quelles sont les perspectives de développement pour l'entreprise ?
G.K : Nous sommes en train de construire une maison certifiée Passiv'haus, que nous inaugurerons en juin prochain. L'objectif est de jouer sur la qualité de l'enveloppe de notre nouvelle gamme, pour monter en puissance et en qualité sur la performance énergétique. Nous allons investir 200 000 euros au total. Nous investissons en plus 200 000 euros pour moderniser notre atelier de fabrication en développant toujours plus de nouveaux procédés, et répondre au marché de la maison passive... Par exemple, isoler les murs en atelier et faire des bardages en automatique. Nous nous ouvrons aussi au marché de l'extension bois. Enfin, en février dernier, nous avons ouvert une agence à Vannes pour développer notre activité dans le Morbihan, l'Ile et Vilaine et la Loire Atlantique.
D'où vous viennent toutes ces idées ?
G.K : Elles sont imaginées collectivement, issues des différentes synergies au sein de l'équipe. Le chef d'entreprise est seulement là pour impulser le mouvement, mettre en pratique les idées de tout le monde et aller de l'avant. Le potentiel est là, il faut juste foncer et faire confiance aux jeunes.
Propos recueillis par Claire Thibault
Les chiffres de l'entrepreneuriat fémininEntrepreneuriat 27 % des PME / TPE ont une femme à leur tête (dont 24 % dans la construction) |
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