Au T3 2023, l’activité des artisans du bâtiment a bel et bien reculé
Des chiffres « à la hauteur malheureusement des prévisions que l'on avait évaluées lors de notre dernier point presse ». Voilà ce qu’a annoncé Jean-Christophe Repon, président de la Confédération de l'artisanat et des petites entreprises du bâtiment (Capeb), lors d’un point presse, avant la présentation de chiffres du 3ème trimestre, ce jeudi 19 octobre.
« C’est sans surprise que l'on voit à nouveau l'activité de l'artisanat du bâtiment reculer », poursuit-il. Le volume d’activité décroît effectivement de 1 %. Et ce davantage parmi les entreprises de moins de 10 salariés (-1 % par rapport au 3ème trimestre 2022) que pour les structures de 10 à 20 salariés (-0,5 %).
« Les entreprises d’aménagement-décoration-plâtrerie et de couverture-plomberie-chauffage résistent relativement mieux que les autres corps de métiers, leur volume d’activité au 3e trimestre 2023 ne reculant que de 0,5 % par rapport au 3ème trimestre 2022 », est-il écrit dans la conjoncture de la Capeb.
Sans surprise non plus, le ralentissement est plus marqué dans la région Auvergne Rhône-Alpes (-2 points), talonné par le Grand-Est (-1,5 points) et la zone PACA-Corse (-1,5 points). En Île-de-France et dans les Hauts-de-France, le repli est en revanche moins marqué, passant de -1 % à -0,5 %.
Les carnets de commandes toujours en baisse
À noter que le niveau des carnets de commandes s’établit à 77 jours de travail au 3ème trimestre 2023. Soit 22 jours de moins qu’un an auparavant. 28 % des entreprises rapportent une réduction des marges, contre 9 % observant une hausse.
Autant dire que le solde d’opinion sur la trésorerie des artisans du bâtiment continue de se détériorer, passant de -5 points pour la moyenne de long terme à -13 points. Selon la note de conjoncture, 21 % des entreprises notent une détérioration de leur trésorerie, tandis que 8 % constatent une amélioration.
« 11 % des entreprises enregistrent une hausse de leur chiffre d’affaires réalisé pour le compte des collectivités locales tandis que 15 % constatent une baisse (soit un solde de -4 points contre -0,7 en moyenne sur longue période) car celles-ci sont plus présentes sur le marché du neuf », lit-on également.
-3 % pour l’activité construction des artisans
Sûrement est-ce pour cette raison que l’activité construction des artisans du bâtiment régresse de 3 % ce troisième trimestre. Peu surprenant, quand on connaît la crise du logement, tant redoutée par la FFB que par les promoteurs immobiliers. Mais quel retour donne la Capeb sur le sujet ?
« Bien évidemment qu'on est très attentifs, de par la disparition notamment de la défiscalisation dans le neuf - la loi Pinel - , de l’obligation zéro artificialisation nette des sols… Maintenant vous entendez moins la Capeb parler de cette problématique-là parce qu’il nous semble important que les gens qui portent le neuf, notamment la promotion immobilière, Action logement, le Medef, la Fédération française du bâtiment » s'expriment sur le sujet, nous répond Jean-Christophe Repon.
« On est moins partie prenante, mais bien évidemment, ça va nous impacter. Nous travaillons aussi dans le neuf pour à peu près 40 % », rappelle le président de la confédération. « Nous sommes sur un marché contracté. C’est pour ça qu'on se parle beaucoup, afin que l'accès au marché de la performance globale ou du maintien à domicile soit permis aux entreprises de petite taille », évoque-t-il.
Sur le segment entretien-rénovation, « une contre-performance majeure » des pouvoirs publics
Car s’ił y a bien une activité qui se stabilise ce troisième trimestre, c’est l’entretien-rénovation (0 %). En tendance annuelle, le segment progresse même de 0,4 %, en incluant les travaux de performance énergétique, qui grimpent de 2 % sur un an.
Il faut dire que la performance énergétique est au coeur des préoccupations, rien qu’avec la réforme de MaPrimeRénov’, qui mise sur la rénovation globale. Un point que déplore la Capeb. Le président encourage plutôt la rénovation globale, mais par étapes, qui « est de plus en plus félicitée », note-t-il.
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« Cela fait plus de 10 ans qu'on engage de l'argent public : des CEE, notamment dans des programmes d'action, de réflexion sur comment mieux rénover l'habitat et comment réussir la performance énergétique - je cite, les programmes PACTE, Rage et PROFEEL - qui ont toujours dit qu'il fallait partir une bonne information globale mais aussi un bon résultat de l'enveloppe. Et de regarder dans cette enveloppe, comment, derrière, on peut travailler les différents sujets. Vous regardez dans les arbitrages de MaPrimeRénov’, dogmatiquement, les directions ont pris la décision de mettre l'énergie au cœur du débat », analyse à ce propos Jean-Christophe Repon.
Et ce recentrage présente des risques pour certaines professions du bâtiment. « Bien évidemment que, si on continue à stigmatiser la chaudière [gaz THPE] et donc nos plombiers-chauffagistes qui ont une compétence là-dedans, on n’atteindra pas les objectifs. Nous, notre vision générale, c’est que la chaudière gaz dernière génération, même si elle est encore carbonée à ce jour, peut permettre d'atteindre les objectifs de rénovation énergétique », défend le président de la Capeb.
Pour ce dernier, les décisions des pouvoirs publics en la matière relèvent d’ « une contre-performance majeure ». « C’est avec déception, qu’on se demande s'il n’y a pas un peu de mépris, puisqu’on devait avoir ce jour un rendez-vous avec le ministre du Logement, qui a été annulé pour la troisième fois », ajoute Jean-Christophe Repon.
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Virginie Kroun
Photo de Une : X @capeb_fr