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La Seine-Saint-Denis, grande gagnante des chantiers olympiques ?

Publié le 26 mars 2024

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Les chantiers olympiques touchent bientôt à leur fin, à l’approche des JO de Paris 2024 qui se tiendront cet été. La Seine-Saint-Denis a reçu la majeure partie des financements consacrés à ces ouvrages. Ces derniers devraient profiter à la population, notamment d’un point de vue logement et redynamisation urbaine au sens large. Décryptage.
La Seine-Saint-Denis, grande gagnante des chantiers olympiques ? - Batiweb

« Territoire de 1,6 million d'habitants », ayant accueilli « vagues migratoires successives » et « laissée exsangue par la désindustrialisation enclenchée à la fin des années 1960 ». Voilà comment Alexandre Marchand, Amélie Baron et Maryam El Hamouchi, journalistes à l’AFP décrivent la Seine-Saint-Denis dans un reportage. 

Un département prolétaire qui devient pourtant le principal écrin des chantiers olympiques. Le Stade de France et le Centre Aquatique de Saint-Denis, le parc des expositions de Villepinte et le site d’escalade du Bourget : quatre sites accueilleront les compétitions des Jeux Olympiques de Paris 2024. Sans compter le Village des athlètes, implanté à l’intersection entre Saint-Denis, Saint-Ouen-Sur-Seine et l'Île-Saint-Denis. 

Autant dire que la Seine-Saint-Denis compte énormément sur l’événement pour se revitaliser, tant au niveau réputation sociale, qu'au niveau urbanisme. Mais le défi est-il relevé, alors que la crise du logement bat son plein, particulièrement en région francilienne

Plus de tertiaire, plus de transports, plus d’équipements publics…

 

Interrogée par les journalistes de l’AFP, Samia Achoui, habitante de la cité des Francs-Moisins, à Saint-Denis, ne l’entend pas de cette oreille. Situé à 500 mètres du Stade de France, le quartier devra se contenter « du bruit des applaudissements », les billets étant trop chers. 

D’autres sont mieux lotis, comme à l’Île-de-Saint Denis, où la municipalité a réussi à obtenir 7 000 billets pour les Jeux, pour ses 8 600 habitants. Un moindre lot de réconfort, quand on sait que la commune a été exposée aux nuisances des chantiers pour la construction du Village des athlètes. 

Les ouvrages olympiques ont coûté 4,5 milliards d'euros - financements publics et privés confondus -, avec 80 % de l’enveloppe (1,7 milliard d'euros), consacrés à la Seine-Saint-Denis. Un budget qui suit la logique de mue urbaine amorcée pour Saint-Denis, lors de la construction du Stade de France pour la Coupe du monde de football 1998, à l’ancien emplacement de réservoirs à gaz.

D’anciennes friches industrielles sont repensées en structures tertiaires, à l'image de l’ancienne usine Alstom, à Saint-Ouen, transformée en Halle urbaine

Le réseau de transports en communs se développe également, avec de nouveaux axes ferroviaires - dont le métro 14 étendu jusqu’à Saint-Ouen - ou les bandes piétons et cyclistes tracées au-dessus du canal Saint-Denis, à proximité des Francs-Moisins. Les circuits remplacent ainsi l’ancien pont routier souvent en panne, et une passerelle aux escaliers difficiles d'accès. Une opération de 10,5 millions d'euros, financée aux deux-tiers par l'argent olympique. Pareil à Dugny, enclave entre le Bourget et La Courneuve, qui bénéficiera d’une meilleure desserte entre les deux villes, notamment à travers la gare du Bourget (RER B et lignes 16 et 17 du Grand Paris Express) et la gare du T11 Dugny-La Courneuve. 

Autre point d’attractivité en chantier : les équipements publics. Après les épreuves de plongeon, water-polo et natation artistique durant l’été, le nouveau centre aquatique en bois de Saint-Denis est censé abriter, sous sa canopée, une nouvelle structure aquatique, qui « manque cruellement » au sein du département, rapporte l’AFP.

… de logements ? 

 

Les chantiers olympiques semblent avoir été pensés pour être pérénnisés avec le temps. Ainsi, les JO de Paris 2024 représentent « un point de bascule. Cela accélère un moment de la transformation du territoire », estime auprès de l'AFP le président socialiste du conseil départemental, Stéphane Troussel.

« On a condensé dans un temps record et avec un aspect quantitatif d'ampleur des livraisons d'équipements, de logements, de voiries, de passerelles, d'équipements publics », ajoute l’élu. 

Et les logements dans tout ça ? On sait par exemple que le Village des athlètes, qui accueillera 14 250 sportifs et accompagnants ainsi que 6 000 para-athlètes, sera reconverti en quartier d'habitation et de bureaux. Il faut dire que la Société publique chargée de la livraison des ouvrages olympiques (Solidéo) a réclamé aux opérateurs immobiliers « un projet qui réponde d'abord [aux besoins locaux] de logements », indique Isabelle Vallentin, directrice générale adjointe de l’établissement. 

La seconde vie du Village des athlètes est prévue dès l’été 2025, avec l’objectif d’accueillir 6 000 nouveaux habitants répartis entre 2 800 logements, deux groupes scolaires, des bureaux pour 6 000 salariés ainsi que des commerces. Un tiers de la centaine d’appartements sera destiné à l’achat, tandis que l’offre restante sera répartie entre les locations et les logements sociaux à hauteur de 25 ou 40 %, selon les communes. La vente de tels logements risque toutefois d’être enrayée par un contexte d'affaissement de l'immobilier.

Autre commune de Seine-Saint-Denis où l’offre des logements devrait être dynamisée par les Jeux Olympiques : Dugny. Son nouveau quartier, servant de « cluster des médias » verra 1 400 logements construits à terme. Ce qui devrait faire bondir d’un tiers la population de 11 300 citoyens. Un tiers des habitations sera réservée à l'accession à la propriété. De quoi diversifier la population de cette ville aux 77 % de logements sociaux, le plus fort taux de France.

« Il y a aussi un parc de logements extrêmement vétuste, donc il fallait développer des lieux d'habitation avec tous les conforts nécessaires », abonde Mme Vallentin.

Tous ces projets assureront-ils cependant des logements à prix « abordables », pour une population dont un tiers vit sous le seuil de pauvreté ? Après tout, c’était la promesse des chantiers menés à Stratford, pour accueillir les JO de Londres 2012. Pourtant, douze ans après, le quartier londonien s’est gentrifié, entrainant une flambée des loyers. 

 

> Consulter le dossier spécial JO de Paris 2024


Virginie Kroun
Photo de Une : Village des Athlètes - V.K  

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