Aptae, la première gamme propane d’Atlantic Systèmes
Pouvez-vous nous présenter Atlantic Systèmes ? Quelle est sa place dans le groupe Atlantic ?
Baptiste Hermenier : On pourrait se contenter de vendre des générations seules, c'est-à-dire vendre une machine qui fait uniquement du chaud, voire du froid, sans se préoccuper derrière de l'usage qui va en être fait. Avec un générateur chaud, on peut faire effectivement du chauffage, on peut faire de l'ECS, on peut faire les deux, on peut faire de l'hybride, on peut faire tout ce qu'on veut chez Atlantic.
Mais on ne veut pas s'arrêter simplement à la fourniture d'un générateur. On veut mieux comprendre le besoin du client. Son besoin fondamental c'est de produire de l’eau chaude sanitaire, de chauffer son bâtiment. C’est ce qui a donné lieu à la création d'Atlantic Systèmes. C'est l'idée que l'on veut aller plus loin que le générateur.
On prend nos propres générateurs, on constitue un système au travers de la régulation, pour ensuite avoir une offre auprès du client qui soit la plus précise possible, à la fois en performance et évidemment en coût d'investissement. Quand il va y avoir un besoin d'hybride en rénovation, on va ajuster au travers du dimensionnement, au travers de la régulation, au travers de l'analyse de son schéma, de ses lois d'eau...
De cette démarche est née la gamme Aptae. À quand remonte cette innovation ?
Baptiste Hermenier : Aptae est un générateur thermo collectif. L’idée vient relativement de loin. On a une certaine légitimité sur ce marché depuis longtemps. On est présent sur l’eau chaude sanitaire collective thermodynamique depuis plus d'une dizaine d'années avec des gammes, dont Hydrapac, Hydramax ou Hydragreen.
On cherche toujours à s'adapter aux besoins et aux évolutions, notamment réglementaires. Donc à partir du moment où la RE2020 est arrivée, on a détecté que c'était une réglementation très orientée pompe à chaleur, y compris sur les postes de chauffage. On a estimé qu'il était nécessaire d'améliorer notre offre avec des gammes chauffage. On a fait dans un premier temps les gammes Effipac au R32.
En parallèle, on commençait déjà à travailler sur la gamme Aptae, qui représente un nouveau pas supplémentaire, puisqu’on savait bien qu'il fallait se diriger vers des fluides plus naturels, plus pérennes au regard des réglementations, donc vers le propane, vers le R290.
Le projet était en gestation depuis plusieurs années. Les premiers coups de crayon ont commencé il y a environ trois ans.
Quand va être commercialisée la gamme Aptae ?
Baptiste Hermenier : C'est sur le point de d'être commercialisé. Les puissances les plus basses [15, 18, 23, 27 kilowatts, NDLR] seront livrées à partir du mois de mars normalement. Cela va se déployer jusqu'à finir avec la 75 kilowatts avant la fin de l'année, aux alentours d'octobre-novembre.
À quel type de bâtisse s’adresse plutôt la gamme ?
Baptiste Hermenier : L'une des forces d’Aptae par rapport à Effipac notamment, c'est que par ses spécificités, ses caractéristiques, elle va pouvoir s'adresser à peu près à tout. On va cocher progressivement l'ensemble des cases du marché : le logement collectif neuf évidemment, mais aussi tout le tertiaire. On va pouvoir aller vers l'hôtellerie, des applications ECS seules, chose qui était difficile à faire en termes de performance avec le R32.
On va vraiment s'adresser à l'ensemble des applications, où on retrouve un besoin de chauffage, d’eau chaude sanitaire, que ce soit en 100 % thermo, que ce soit en hybride, etc.
Aptae est réversible, cela veut dire que la machine ne va pas se contenter de faire uniquement du chaud, elle va faire aussi du froid. On commence à retrouver ce besoin de faire du froid en été, en logement collectif déjà, notamment dans le sud de la France, mais aussi dans beaucoup d'applications tertiaires.
Quels défis a impliqué le développement d’une solution adaptée au gaz propane ?
Baptiste Hermenier : Le propane a de vrais avantages. Il permet de monter haut en température. C'est très important pour les applications ECS. Il fonctionne assez bien à basse température extérieure, donc assez bien pour les régions les plus froides, en altitude, etc. Il a l'immense avantage d'avoir un potentiel de réchauffement climatique très bas, de l'ordre de 3, ce qui fait qu’il peut passer la F-gas [ réglementation visant réduire les émissions de gaz à effet de serre fluoré d'ici 2027, NDLR], sans difficultés.
Il a un inconvénient : c'est un gaz inflammable et explosif. Donc il pose des questions de sécurité, qui jusqu'à présent n'étaient pas forcément abordées dans les pompes à chaleur, les fluides précédents comme le R410, même le R32 n’ayant pas cette criticité. Avec le R290, sur des contraintes d'intégration des machines au niveau du bâti, il y a des réglementations, il y a l’Atex, la norme NF EN 378…
Il y a un accompagnement nécessaire de nos clients, mais également une attention à avoir dans la conception de la machine en elle-même, sur les taux de fuite acceptables. Au niveau du circuit thermodynamique, on retrouve forcément des valves, des brasures, tout un tas d'éléments qui finissent toujours par représenter des micros-fuites.
On a été obligé d'aller un cran beaucoup plus loin dans l'herméticité totale du circuit et dans la gestion d'éventuels incidents, dans le fait de s'assurer que tous les composants électriques ne peuvent pas générer d’étincelles, dans des zones où du propane pourrait se retrouver, etc.
Vos clients professionnels (installateurs, bureaux d’études, exploitants…) ont-ils été consultés durant la phase de R&D ?
Baptiste Hermenier : On n'aime pas faire les choses tout seul de notre côté. Sur la conception d’Aptae, ce sont plusieurs dizaines de clients qui ont participé, toutes catégories confondues : bureaux d'études, installateurs, exploitants, distributeurs… On est allé les voir sur place dans leurs conditions de travail, on les a fait venir à la fois sur notre siège à Arcueil, mais également dans l'usine de Boz dans l'Ain. Rien qu’au mois d'octobre, plus de 30 installateurs et exploitants sont venus voir des prototypes, pour donner leur opinion. Cela nous a amené à faire des modifications.
On l'a fait également avec des filiales étrangères, puisque ce n’est pas un produit qui sera uniquement pour la France. On est international, donc ce sont des gammes qu'on va retrouver en Italie, en Espagne, en Angleterre, en Belgique, en Pologne, un peu partout [presque simultanément qu’en France, avec petits écarts de quelques semaines, NDLR]. Donc on l'a fait également avec des clients étrangers pour pouvoir adapter le produit.
Pour l'intégrer, il y a les architectes également qui ont leur mot à dire. Donc on a beaucoup travaillé sur cet aspect-là, sur la qualité perçue, sur l'encombrement notamment en termes de hauteur, sur de l'acoustique. Et puis à ne pas oublier : les raccordements hydrauliques et électriques, pour qu'ils soient faciles à installer.
La connectivité est-elle envisagée pour la gamme Aptae ?
Baptiste Hermenier : Ce n’est pas tant sur Aptae que sur la logique système. On va avoir un nouveau système de contrôle qui arrive lui aussi courant de l'année et qui servira notamment à piloter Aptae, où la connectivité est renforcée, notamment avec l'intégration native du modbus. On pense également à d'autres protocoles qui pourraient être ajoutés, au travers de modules d'extension.
Par contre, le fait que les machines puissent communiquer les unes avec les autres et avec tous les systèmes de nos clients exploitants, c’est disponible nativement pour Aptae.
La réforme de MaPrimeRénov’, qui valorise toujours la PAC, motive-t-elle l’innovation chez Atlantic Systèmes ?
Baptiste Hermenier : Ce n’est pas forcément les éléments de MaPrimeRénov’ qui poussent à développer ces offres thermodynamiques. La thermodynamique collective vient de loin. Cela vient même d'un peu avant la RE2020. Il y a l'expérience E+C-, qui avait déjà entre guillemets généré cet intérêt.
Avant tout, l’objectif, c'est de décarboner et puis de respecter le RE2020 ou le décret tertiaire en rénovation. On ne fait pas de la décarbonation juste parce qu’il y a des aides gouvernementales, évidemment. Les aides aident à accompagner le marché, à le développer.
À noter néanmoins que les dernières évolutions de MaPrimeRénov’ ont un impact pour les copro, avec un taux de financement un peu plus élevé en 2023, avec MaPrimeRénov’ Copropriétés. Cela pourrait favoriser le développement de la PAC, notamment au travers de l’hybridation.
Il y a par contre un petit inconvénient. Il y a une fin d'éligibilité des chaudières gaz, au 1er janvier 2024. Cela pourrait aussi favoriser un certain statut quo de la part des copropriétés, parce que s'ils ne peuvent pas remplacer des équipements en place, ils pourraient être tentés, de faire durer des installations jusqu'au maximum, plutôt que de les rénover.
La réforme de MaPrimeRénov’ mise également sur la rénovation globale, quel est votre avis sur le sujet ?
Baptiste Hermenier : Ce que je peux dire, c'est qu’on cherche à bien sensibiliser nos clients à penser leur rénovation de manière globale, mais surtout à faire les choses dans le bon ordre.
On a déjà vu dans le cadre des pompes à chaleur, des remplacements de générateurs, puis ensuite une rénovation du bâti avec une isolation. C’est plutôt une mauvaise idée de faire ça. Encore plus dans le cas d'une pompe à chaleur, parce qu’une fois la rénovation du bâti effectuée, elle sera surpuissante et la surpuissance n’est jamais une bonne idée, puisque cela peut justement générer des désordres au niveau du fonctionnement de l'installation. Cela risque de détériorer la machine, notamment au niveau du compresseur.
Donc oui, on cherche à accompagner la filière en sensibilisant nos clients sur les contraintes des machines, comment elles fonctionnent bien, dans quelles circonstances… Et faire en sorte que nos clients [bureaux d’études, installateurs, exploitants, NDLR] pensent les choses, pas sur l’année à venir, et que s'ils ont l'intention de faire une rénovation derrière du bâti, qu'ils pensent dans ce cas-là à l’hybridation par exemple.
Mieux vaut avoir un taux d'hybridation plus faible pendant un an ou deux, le temps que la rénovation du bâti se fasse, pour aboutir à un taux d'hybridation idéal deux ans après, plutôt que d'installer trop de pompes à chaleur, avoir un bon taux d'hybridation en point de départ et finir avec une machine totalement surpuissante et en fait avoir surpayé son installation.
Propos recueillis par Virginie Kroun
Photo de Une : Atlantic Systèmes