Travailleurs détachés : l'accord garantit deux avancées majeures
D'après une directive (loi européenne) datant de 1996, une entreprise peut « détacher » des salariés dans un autre pays de l'UE pendant deux ans maximum, à condition d'appliquer certaines règles du pays d'accueil (salaires, conditions de travail) tout en versant les cotisations sociales dans le pays d'origine. Faute de contrôle efficace, ces principes sont régulièrement bafoués, notamment dans le secteur du bâtiment où nombre de travailleurs détachés sont payés en-deçà du salaire minimum.
Réunis à Bruxelles lundi, les ministres européens ont longtemps achoppé sur un point : la mise en cause des entreprises donneuses d'ordre comme des filiales impliquées dans les fraudes de travailleurs détachés. Une dizaine d’États membres dont la France souhaitaient que ce principe de responsabilité soit « obligatoire » mais ils se heurtaient à une minorité de blocage qui souhaitait au contraire que ce soit optionnel. La Pologne qui a longtemps marqué son opposition aux propositions sur la table a finalement approuvé le texte.
Deux avancées majeures étaient attendues
L'accord trouvé entre les pays garantit désormais que la liste des documents exigibles auprès des entreprises en cas de contrôle soit une liste ouverte. La France fixera donc par la loi nationale la liste des documents exigibles pour tous les travailleurs détachés en France. La directive permettra également d’imposer des règles dans les pays qui en étaient dépourvus. Pour favoriser la sécurité juridique de ce nouveau cadre, la Commission et les autres États devront être informés des documents exigibles dans chaque pays.
Une dizaine d’États membres dont la France souhaitaient que ce principe de responsabilité soit obligatoire mais ils se heurtaient à une minorité de blocage qui souhaitait au contraire que ce soit optionnel. La France a eu gain de cause, puisque la responsabilisation des entreprises donneuses d’ordres du secteur du bâtiment et des travaux publics vis-à-vis de leurs sous-traitants, obligatoirement et dans tous les États, sans seuil d’application, sous la forme d’une responsabilité solidaire ou, le cas échéant, via un mécanisme de sanctions équivalentes du donneur d’ordre, est actée.
Il sera désormais possible d’établir une chaîne de responsabilités pour lutter plus efficacement contre la fraude et plus largement contre les montages frauduleux. Cette directive protégera également les travailleurs détachés dont les droits seront davantage respectés, ainsi que les travailleurs français qui ne subiront pas une concurrence déloyale, tout comme les entreprises qui respectent les règles.
La CAPEB salue l’accord trouvé hier par les ministres de l’Emploi et des Affaires sociales européens sur la directive d’exécution relative au détachement des travailleurs. La CAPEB voit donc dans cette décision une première réponse précise aux revendications qu’elle portait depuis le début de l’année 2013, notamment à l’occasion de ses deux manifestations nationales du 18 janvier et du 13 septembre. Patrick Liébus poursuit : « Nous n’en avons pas fini avec cette question. Il reste que l’écart du coût social du travail entre états demeure le même et qu’il faudra bien s’attaquer à une harmonisation des règles fiscales et sociales au niveau européen afin que nous soyons tous sur le même pied d’égalité ». La Fédération Française du Bâtiment (FFB) salue aussi l’accord obtenu à l’arraché par les ministres européens sur la directive détachement. La FFB plaide, par ailleurs, pour l’adoption de mesures nationales plus coercitives, notamment la responsabilisation accrue des donneurs d’ordres qui auraient recours à des offres anormalement basses. Les députés Gilles SAVARY et Chantal GUITTET ont annoncé le dépôt prochain d’une proposition de loi visant à lutter contre le dumping social et la concurrence déloyale, initiative que la FFB suit avec une très grande attention. |
B.P