Construction : des normes sur mesure pour les Outre-mer ?

Audrey Belim (PS), Sénatrice de La Réunion, a tenu une conférence de presse aux côtés de la Chambre de Métiers et de l'Artisanat (CMA), de la Confédération de l'Artisanat et des Petites Entreprises du Bâtiment (CAPEB), de la Confédération des Petites et Moyennes Entreprises (CPME) et de la Fédération Réunionnaise du Bâtiment et des Travaux Publics (FRBTP).
L’objet de cette rencontre était de présenter l’adoption de la proposition de loi visant à adapter les normes de construction aux spécificités ultramarines.
Une réponse attendue depuis plus de 10 ans
« Cela fait plus de 10 ans que nous attendions cette mesure », a souligné la FRBTP. Le vote historique du Parlement européen du 10 avril 2024 a ouvert la voie en permettant aux Départements et Régions d’Outre-mer ainsi qu’à Saint-Martin de déroger au marquage CE pour les produits de construction.
Restait à définir un nouveau référentiel pour ces territoires, une mission désormais encadrée par la proposition de loi portée par Audrey Belim et adoptée à l’unanimité au Sénat.
Si le chemin a été semé d’embûches — la rapporteure LR s’y étant initialement opposée — la sénatrice a pu compter sur le soutien d’autres groupes politiques, y compris celui du groupe LR, ainsi que sur l’appui des ministres de l’Outre-mer et du Logement, Manuel Valls et Valérie Létard. « Nous ne pouvions plus attendre », a-t-elle insisté.
Une triple urgence : sociale, économique et environnementale
En autorisant l’utilisation de matériaux locaux ou issus du bassin géographique régional, cette nouvelle législation permet de réduire les surcoûts liés à l’importation. Ce levier aura un impact direct sur le pouvoir d’achat des familles, notamment en baissant le coût des loyers, souvent le premier poste de dépense des ménages.
Jusqu’à présent, les normes calquées sur les standards de l’Hexagone freinaient le développement de la filière locale du BTP et limitaient les innovations. En s’adaptant aux réalités du territoire, cette loi ouvre la voie à la création d’emplois et stimule l’économie réunionnaise.
Par ailleurs, en réduisant la dépendance aux importations massives de matériaux, l’empreinte carbone de l’île pourra être significativement diminuée.
Des comités référentiels pour bâtir un cadre adapté
Pour garantir la mise en œuvre de ces nouvelles normes, la loi prévoit la création de comités référentiels construction. Ces instances auront notamment pour mission d'encadrer l'exemption de marquage CE, d'élaborer des référentiels adaptés, et de soutenir l’innovation dans le domaine des matériaux et procédés de construction.
Cependant, la rigueur reste de mise : aucun compromis ne sera fait sur la qualité des matériaux. Les représentants de l’État participeront au contrôle des protocoles de validation pour assurer la sécurité et la durabilité des bâtiments.
Mais l’étape décisive reste encore à franchir : l’inscription rapide de cette proposition de loi à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale. Les filières économiques et Audrey Belim appellent les députés à accélérer le processus législatif. Car pour adapter durablement les normes de construction en Outre-mer, le temps presse.
Marie Gérald
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