Aux Emirats Arabes Unis «L'Ile du bonheur» fait le malheur des ouvriers
Ce qui est reproché aux entreprises émiraties du BTP : les conditions de travail exécrables de leurs ouvriers venus d'Asie du sud. "Ils endurent des conditions de travail dangereuses et des années d'endettement auprès des agences de recrutement pour des frais qui devraient être payés par les employeurs. [Ceux-ci] retiennent régulièrement leurs salaires et confisquent leurs passeports. (...) Les Emirats Arabes Unis ne protègent pas les travailleurs en ce qui concerne leurs droits à s'organiser, à négocier collectivement et à faire grève".
Travail forcé
De légères améliorations ont été apportées depuis mais tant reste à faire. Dans un nouveau rapport publié le 19 mai, Human Rights Watch (HRW) parle de "grave exploitation et des abus qui dans certains cas équivalent à du travail forcé". Ainsi, l'organisation reconnaît que "si le gouvernement des Emirats s'est attaché à améliorer les conditions de logement et à garantir le paiement régulier des salaires ces dernières années, nombre d'atteintes aux droit du travail demeurent constantes" : endettement, bas salaires, frais de recrutements...
Lors de la visite officielle de Nicolas Sarkozy pour le coup d'envoi de la construction du Louvre Abou Dhabi, l'ONG a tenté de sensibiliser les autorités françaises. L'architecte du projet, Jean Nouvel, a déclaré qu'il serait "très vigilant" et qu'il veillerait "aux conditions de sécurité, aux conditions de confort et au respect de ces travailleurs". Mais on voit mal comment il compte s'y prendre pour enrayer une situation si désastreuse.
L'Ile du Bonheur
Le projet du Louvre n'est pas le seul concerné : "Abou Dhabi, capitale des Emirats Arabes Unis, espère faire de Saadiyat Island (« L'Ile du Bonheur ») une destination touristique internationale", explique HRW. La région a bien raison d'assurer ses arrières pour l'après pétrole... L'île "comptera quatre musées et une salle de spectacle conçus par les Ateliers Jean Nouvel, Foster and Partners, et [Frank] Gehry Partners ; ainsi qu'un campus de la New York University, des terrains de golf, des hôtels, et de coûteuses résidences" note l'ONG.
Alors que l'île coûtera 27 milliards de dollars américains aux Emirats, le journal Libération du 27 mai pointe que les ouvriers ne touchent "que 8 dollars par jour en moyenne pour douze heures de travail". Suite à l'insistance de Human Rights Watch, l'agence en charge du projet du Louvre Abou Dhabi a tout de même "pris certaines mesures pour obtenir des garanties contractuelles significatives pour autoriser un contrôle indépendant des droits des travailleurs, mais même le contrat de l'Agence ne comporte pas de garanties ni de clauses lui permettant de faire appliquer les droits des travailleurs" conclut l'ONG. On piétine...
Laurent Perrin