Passoires énergétiques : les territoires français les plus concernés en 2022
Alors que la mise en location de passoires énergétiques sera progressivement interdite à partir de 2025, et qu’un gel des loyers est déjà prévu dès cet été, la plateforme Hello Watt a tenu à identifier les territoires concentrant le plus de passoires thermiques en France, dans le but de mieux comprendre les enjeux locaux de rénovation énergétique.
À partir des données fournies par l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME) et du recensement INSEE de 2017, Hello Watt a établi un total de quatre classements. Un premier classement recense de fait les villes françaises ayant, en proportion, le plus de passoires thermiques, et un autre concerne les villes ayant la plus faible proportion de passoires, en prenant en compte uniquement les 50 plus grosses villes de France en nombre d’habitants. Deux classements similaires ont également été réalisés pour les départements français.
Un contraste entre le Sud et l’Île-de-France
Les villes présentant le moins de passoires, en proportion, sont majoritairement situées dans le sud de la France. En effet, du côté des bons élèves, Perpignan arrive en tête avec 4,2 %, suivie de Nîmes avec 6,6 % et d’Angers, qui complète le podium avec 6,6 % également.
L’une des raisons expliquant ce phénomène réside dans les matériaux utilisés pour la construction des logements, qui varient ou ont varié selon les régions. En Provence par exemple, beaucoup de maisons sont en pierre, ce qui permet d'emmagasiner la chaleur la journée et de la diffuser progressivement dans le logement lorsque la température baisse.
La faible part de logements anciens peut aussi expliquer en partie les bons résultats de certaines villes. À Montpellier (6ème avec 7,2 %), par exemple, moins de 35 % des logements ont été construits avant 1970, alors que la première réglementation thermique en France date de 1974. Cependant il existe des contre-exemples, puisqu’à Toulon (9ème avec 7,5 %), plus de 66 % des logements datent d’avant 1970. Dans ce cas de figure, c’est très certainement des politiques de rénovation ambitieuses qui sont à souligner.
Du côté des mauvais élèves, les villes ayant les plus fortes proportions de passoires thermiques sont majoritairement situées en Île-de-France. Paris remporte la première place de ce classement avec 24 % de logements mal isolés – soit plus de 330 000 passoires – tandis que Saint-Denis (93) et Argenteuil (95) arrivent deuxième et troisième, avec respectivement 22,3 % et 21,8 %. D’après Hello Watt, la principale cause de cette tendance est la proportion de logements construits avant 1970. Dans la capitale, 78 % des logements ont été construits avant cette date.
Des contraintes techniques peuvent également freiner le peu de travaux entrepris dans ces villes très denses : la part de logements collectifs - où les décisions doivent être prises collégialement - est élevée, et le prix du m2 peut dissuader certains foyers de réduire leur surface habitable avec une isolation intérieure. Autre enseignement important : la présence de nombreuses villes réputées « riches » dans ce classement. De quoi tordre le cou à certaines idées reçues, puisqu’en effet, qui dit hauts revenus ne dit pas forcément logement neuf ou bien isolé, quand près de 58 % des passoires thermiques sont occupées par des foyers intermédiaires ou aisés en France.
Les zones du Sud et de l’Ouest ont un DPE correct, les Alpes ont le moins bon
À l’échelle départementale, on note la forte présence de départements du Sud et de l’Ouest, parmi ceux qui comptent le moins de passoires thermiques. En Gironde, qui arrive en tête du classement, moins de 5,4 % des logements sont classés F ou G, soit presque six fois moins que dans les Hautes-Alpes ou quatre fois moins qu’à Paris. Les Pyrénées-Atlantiques et le Gard complètent le podium, avec respectivement 5,9 % et 6 % de logements classés F et G. Le climat, l’ancienneté des bâtiments, ou la présence de politiques de rénovation énergétique ambitieuses peuvent ainsi expliquer ce phénomène.
Du côté des Alpes, cela se complique, car les trois départements qui ont le plus de passoires thermiques sont les Hautes-Alpes (30,2 %), la Savoie (28 %) et la Haute-Savoie (26 %). En cause, le climat froid et rugueux, qui demande un besoin en chauffage important et augmente la consommation au mètre carré.
Cependant, les régions alpines ne sont pas les seules concernées, puisque la présence de zones dites « rurales » sont également à noter dans ce classement. À titre d’exemple, le Cantal arrive à la quatrième place avec 25,8 %, la Lozère sixième avec 22,5 %, la Nièvre septième avec 22,1 %, tandis que la Corrèze conclut le top 10 avec 20,2 %. Là encore, l’ancienneté des constructions et les matériaux utilisés peuvent être à l’origine de certains de ces chiffres. L’absence de politique majeure de rénovation énergétique dans ces départements peut de la même manière expliquer une partie de ces résultats.
Robin Schmidt
Photo de une : Adobe Stock