Plan Bâtiment Durable : « On a besoin de coups de projecteurs forts sur la rénovation »
Pouvez-vous nous présenter le Plan Bâtiment Durable et nous expliquer quelle est sa mission ?
Philippe Pelletier : Le Plan Bâtiment Durable est une mission publique qui a été lancée depuis bientôt 15 ans. Sa mission est de mettre sous tension la société civile pour la rassembler autour de cet objectif de bâtiment sobre en énergie et à faible empreinte environnementale, à l’horizon 2050. L’ensemble des forces vives concernées par le bâtiment se rassemble pour réfléchir à la façon de faire progresser utilement les choses. Il s’agit de trouver quels sont les dispositifs nécessaires, quelles sont les lois et règlements qui s’imposent pour mener à bien la mission. Depuis qu’on a lancé cette mission, l’essentiel des dispositions en place aujourd’hui résulte de ce qui a été proposé par nos groupes de travail. Comme par exemple, la mise en place de l’éco-conditionnalité des aides et le label RGE, ou encore la RE2020. Nous sommes une sorte de trousse à outils, très largement branchée sur les concertations.
Qu’est-ce qui vous a motivé à l’idée de participer aux Renodays et quels messages souhaitez-vous y faire passer ?
Philippe Pelletier : On a besoin de coups de projecteur forts sur le sujet de la rénovation, et dans une acception large. C’est-à-dire pas uniquement la rénovation énergétique, mais aussi la rénovation qui concerne l’adaptation des locaux, des logements ou des lieux professionnels pour les nouveaux usages. Le mot Renodays ne contient pas le mot énergie. Il laisse donc entendre une rénovation dans une acception large. Cela signifie à la fois la rénovation des logements sur le plan énergétique et sur le plan de leur adaptation aux nouveaux usages que sont principalement le vieillissement des occupants, et secondairement les nouveaux usages des jeunes ménages qui organisent une autre façon de travailler. Je trouve important que pendant deux jours, il y ait un lieu pour rassembler les gens, les acteurs et les idées autour de ces sujets qui doivent rapidement trouver leur maturité.
Quel est votre regard actuel sur l’immobilier et le bâtiment concernant l’environnement et l’efficacité énergétique ?
Philippe Pelletier : Je trouve que les gouvernements et les pouvoirs publics successifs depuis le Grenelle de l’environnement en 2007 ont fait du bon travail. Ils ont su trouver les encadrements juridiques nécessaires, ainsi qu’un bon équilibre entre l’incitation et la contrainte. La société a elle aussi évolué. Elle a fait un saut considérable dans la compréhension du sujet, dans sa perception économique et physique. On a déclenché un processus, les gens comprennent la nécessité de faire des travaux chez eux.
Le maillon faible c’est l’offre. Les industriels, constructeurs, promoteurs, architectes… Cette chaîne, que j’appelle l’industrie immobilière et qui regroupe les travaux et les services, est une industrie dont le niveau de performance est moyen et dont la présence sur l’ensemble du territoire n’est pas acquise. On a un vrai problème de disponibilité de l’offre. En métropole, vous n’aurez aucune difficulté à faire une rénovation globale. En territoire rural ou périurbain, c’est une autre histoire. Vous ne trouverez que des artisans qui interviendront dans leur spécialité, mais vous ne trouverez personne pour faire la synthèse entre le travail de ces artisans et faire en sorte qu’il y ait une action globale qui soit menée et qui seule, assure une rénovation globale et performante. L’industrie immobilière n’a pas encore fait la mue que les autres branches de l’industrie en France ont fait.
Que pensez-vous de Patrice Vergriete, le nouveau ministre du Logement ? Pensez-vous qu’il va faire davantage pour le logement et la rénovation énergétique ?
Philippe Pelletier : Je connais Patrice Vergriete, c’est un homme à forte sensibilité sociale. C’est selon moi un atout important pour conduire l'action de transformation de notre offre de logements. Cela signifie qu’il va continuer à embarquer dans le train les plus modestes. On aura une rénovation pour tous les Français. Il a, dans les relations entre les collectivités territoriales et l’État, le sentiment qu’il faut que chacun ait son rôle mais que les collectivités territoriales n’ont pas encore pleinement le rôle qui leur revient.
Je pense et j’espère que le tandem Béchu-Vergriete va permettre de lancer une nouvelle phase de décentralisation. La rénovation va passer par un changement de maille d’intervention, par le fait de donner la main aux collectivités territoriales pour conduire la croisade et faire en sorte que localement, chacune avec ses spécificités, on entre dans une rénovation plus massive tous usages confondus. Cela suppose donc de donner la main aux collectivités. Si on ne fait pas ça, cela restera insuffisant.
Propos recueillis par Jérémy Leduc
Photo de Une : Plan Bâtiment Durable