Premier bilan du test HQE Performance Économie Circulaire
En 2018, l’alliance HQE-GBC lançait un cadre de définition de l’économie circulaire. C’est pour expérimenter le référentiel et évaluer l’impact des actions réalisées sur le terrain, qu’une phase de test a été lancée. Le test HQE Performance Économie Circulaire a permis l’évaluation de 23 projets : 7 projets rénovés ou réhabilités, et 16 projets neufs. Il a été mené sur différentes typologies de bâtiments : tertiaire de bureaux (9), résidentiel collectif (6), tertiaire (5) et maisons individuelles (3).
Invité à témoigner, Mickaël Thiery, adjoint au sous-directeur de la Qualité du développement durable (QC), au ministère de la transition écologique, a remercié l’Alliance pour « le développement de ce type d’approche qui a vraiment une portée de préfiguration ». Il pense aux labels notamment, et aussi aux réglementations. La phase de test lancée en 2019 est « assez bien rodée », a-t-il déclaré, tout comme l’avait été l’expérimentation HQE Performance pour les bâtiments neufs ; des initiatives qui ouvrent la voie à l’écoconception.
« L'économie circulaire, c'est une petite musique qu'on entend de plus en plus ». « Ce test tombe vraiment à pic ». Il a rappelé les objectifs de valorisation de la loi de transition énergétique pour la croissance verte, ou encore la notion d’évolutivité des bâtiments introduite par la loi Elan, « avec cette accessibilité qui doit s’inscrire dans une logique de fonctionnalités » et où l’on peut retrouver la préfabrication. « Au travers de la modularité, on est vraiment dans l’esprit de l’économie circulaire ». La loi anti-gaspillage ambitionne, elle, d’améliorer la traçabilité, ce qui permettra « d’accroître le recyclage, faciliter les démarches de réemploi ». Il a en outre cité deux outils : « le bordereau de suivi des déchets au niveau des centres de collecte, et le diagnostic ressources ».
« L’économie circulaire a énormément d’externalités positives », a-t-il insisté. « Il s’agit de les assembler, d’évaluer les impacts économiques et environnementaux sur l’ensemble des critères de l’analyse de cycle de vie. Tout cela mérite vraiment une approche globale pour bien cerner l’ensemble des bénéfices ».
Un test en 4 étapes
Nadège Oury, chargée de mission à l’Alliance HQE-GBC, a détaillé les étapes du test :
- La définition d’un profil économie circulaire ;
- La réalisation d’un ACV Bâtiment (sur la base du label E+C- et au-delà. Prise en compte par exemple d’un indicateur déchet, épuisement des ressources…) ;
- En option pour la rénovation, un focus sur les scénarios de fin de vie (comparaison des FDES/PEP avec des données réelles du chantier) ;
- Test de l’outil d’Analyse des Flux de Matières (MFA) Bâtiment.
Qu’est que la MFA ? « C’est une nouvelle méthodologie ». L’outil repose sur le principe de Lavoisier qui est de dire « Rien ne se perd, rien ne se créé, tout se transforme », a-t-elle expliqué. Sont analysés les flux entrants dans le bâtiment, donc les produits de construction et équipements, ainsi que les flux sortants. Il permet de définir les matières réemployées, réutilisables, recyclables en sortie, c’est-à-dire des matières secondaires. Et propose un indicateur d’intensité de transport pour définir s’il est pertinent de recycler la matière (distance entre le chantier et le centre de traitement notamment). Avec cet outil, « on peut, dès la conception, savoir si notre projet va respecter l’objectif de 70% de valorisation des déchets du BTP ».
Sur ce projet financé par l’Ademe, l’Alliance HQE était accompagnée de Cerqual, Certivea, le CSTB et le bureau d’études Evea. 70 acteurs du monde de la construction se sont mobilisés partout en France. L’intérêt des tests est « d’aller vers la performance ». L’ACV est une méthode multicritère. En s’appuyant sur l’outil, « on va avoir une diversité d’indicateurs. On l’a bien vu dans ce test, si on choisit un produit de façon monocritère, on ne va pas être bon. Pour un indicateur, on peut ne pas être impactant mais pour un autre, on peut l’être ».
Rénovation et économie circulaire
Si rénovation ne rime pas toujours avec économie circulaire, le test a démontré que les notions pouvaient parfaitement se complémenter. Tendre vers une économie circulaire dans le cadre de la rénovation de logements collectifs permettrait de diminuer « de près de trois » les impacts environnementaux par rapport au neuf, avance Nadège Oury. « Il faut aller dans ce sens ».
L’ensemble des intervenants, promoteurs, constructeurs et architectes, ont appelé les industriels à se mobiliser pour produire les fiches FDES, et ce afin d’avoir des données « satisfaisantes » pour une bonne utilisation des outils et notamment du MFA, et rattraper le retard de la France sur ces questions d’économie circulaire.
En guise de conclusion, Nicolas Doré, Chef de service adjoint du service Bâtiment à l’Ademe, a salué l’initiative. « L’économie circulaire appliquée au bâtiment, ça reste quand même un concept assez nouveau (…), un peu abstrait et pas très opérationnel », a-t-il souligné. « On ne fait que répéter l’utilité de ces défricheurs qui veulent aller plus loin, plus vite ». Se référant au label d’État qui doit permettre d’aller au-delà de la RE2020, il a estimé que les travaux menés dans le cadre du HQE Performance Économie circulaire arrivaient à point nommé pour être embarqués dans le label ; l’outil MFA notamment dont le développement sera soutenu financièrement par l’Ademe afin de le rendre « encore plus facilement utilisable » et pour « agréger de la donnée. Cette analyse de flux matières semble être un bon moyen de faire avancer le concept d’économie circulaire ».
Rose Colombel
Photo de une : ©Adobe Stock