Le fonds friches grimpe à 750 millions d’euros
C’est un défilé ministériel qui s’est déroulé ce samedi 8 janvier sur le site Cosserat à Amiens (80). Le Premier ministre Jean Castex, la ministre de la Transition écologique Barbara Pompili, ainsi que la ministre chargée du Logement Emmanuelle Wargon, se sont en effet déplacés dans cette ancienne manufacture de velours picarde, née à la fin XVIIIème siècle.
300 000 d’euros consacrés au réaménagement de 5 hectares du site industriel
Autrefois de renommée internationale et employant à son apogée 1 100 salariés sur 800 métiers à tisser, l’usine est rachetée en 2004 avant de fermer ses portes en 2012. Mais dix ans plus tard, la manufacture de Cosserat retrouve désormais un second souffle, en devenant lauréate du second appel à projet du fonds friches lancé par l’Ademe.
300 000 euros sont ainsi versés à son plan de reconversion. Baptisé « La Tisserie », ce projet tend, à l’horizon de 2025, à réhabiliter 8 000 m2 de bâtiments, et construire 34 000 m2 de nouveaux édifices, compris sur 5 hectares réaménagés. Un chantier qui sera à terme « une bonne illustration de mixité, sociale et résidentielle » selon Matignon. Dans le détail, 400 logements - dont 50 dans les édifices historiques -, 500 m2 de commerces et 6 000 m2 de bureaux, lieux de formation et locaux d’activités s’y érigeront.
« Avec beaucoup d’humilité, nous avons été amenés à travailler sur un site avec une histoire, un patrimoine, et l’idée n’est pas d’y faire un pastiche futuriste, mais de respecter le site avec toutes ses composantes », décrit Yoann Choin-Joubert, PDG de Réalités, promoteur privé qui a acquis le site Cosserat en 2019, et en charge de « La Tisserie ».
L’intéressé ajoute : « Ce projet représentera un investissement de 110 millions d’euros sur le territoire, 800 habitants en 2026 lorsque tous les logements seront livrés, 330 salariés à terme travailleront sur le site. Nous créons un véritable éco-quartier à haute qualité de vie ouvert à tous les Amiénois, comme nous savons et aimons les construire ».
« La Tisserie » fait ainsi partie des 21 projets lauréats, bénéficiaires dans l’ensemble de 18 millions d’aides au financement, et mobilisent 64 ha de friches, abonde Matignon.
De quoi répondre à l’objectif zéro-artificialisation des sols d’ici 2050, traduit notamment dans la loi Climat et résilience. La reconversion de friches industrielles semble un bon levier contre le phénomène, comme nous l’a rappelé en décembre le groupe Apave, alors qu’en France, 20 000 à 30 000 hectares d'espaces naturels sont artificialisés chaque année.
Le plan France Relance, lancé à l'été 2020, a ainsi prévu la mise en place du fonds friches, avec un premier appel à projets estimé à 300 millions d’euros. Celui-ci a été complété par un second appel à projets, atteignant les 350 millions d’euros et 503 projets déjà identifiés, selon les annonces de Jean Castex en mai dernier.
Le Premier ministre se réjouit du bilan du dispositif, qui « marche très bien », la dotation initiale étant partie « comme des petits pains », et ayant permis la « reconstruction ou réhabilitation de 100 000 logements ».
La visite qu’il a menée en compagnie de Barbara Pompili, d'Emmanuelle Wargon et de la préfète de la Somme, Muriel Nguyen, tend à montrer qu’« on peut à la fois lutter contre l’artificialisation des sols et continuer à promouvoir une politique ambitieuse en termes de construction de logements, qui est très sensible sur les territoires, où les marchés immobiliers sont déjà en tension », appuie Matignon.
« C'est en général plus long, plus compliqué et plus cher de construire sur des friches », poursuit la ministre chargée du Logement, qui voit dans le projet de reconversion des friches amiénoises de Cosserat « un renouveau économique ».
Malheureusement, les retours sur place ne sont pas unanimement élogieux. François Ruffin, député de la Somme, estime certes le potentiel du projet « La Tisserie », mais craint derrière une bétonisation de « dizaines d'hectares à l'entrée d'Amiens », et l'agrandissement de la zone d'activités autour d'Amazon.
100 millions d’euros supplémentaires ajoutés au fonds friches
Le Premier ministre a également profité de cette visite pour annoncer le lancement d’un nouvel appel à projet au 1er trimestre 2022, plus précisément aux alentours de mars, et qui ajoute 100 millions d’euros au budget initial. La nouvelle suit les intentions d’Emmanuel Macron, qui révélait déjà l'été dernier vouloir pérenniser le fonds friche au-delà de 2022, probablement jusqu’en 2026.
Le Premier ministre a fait le point sur un autre dispositif : le 4ème programme d’investissements d’avenir (PIA 4), lancé en septembre 2020 et doté de 20 milliards d'euros sur cinq ans. Son volet consacré à la ville durable compte 675 millions d'euros, et neuf projets lauréats en seront bénéficiaires.
Virginie Kroun
Photo de Une : Twitter @Jean Castex