200 tonnes d’échafaudages et 50 tonnes de gradins, c’est le poids des équipements qu’il aura fallu mettre en place à l’intérieur du Grand Palais pour que le Théâtre Musical du Châtelet puisse reprendre la comédie musicale Singing'in the Rain. En effet le théâtre est fermé pour travaux pendant 18 mois environ.
Avec sept « couches » de réseau depuis sa fondation en 1962, l’installation électrique du célèbre théâtre situé place du Châtelet, dans le centre de Paris, avait besoin d’un bon coup de jeune. Les responsables de la maintenance ne disposaient pas de plans détaillés de l’installation. Il arrivait qu’ils trouvent des fils électriques inutilisés mais sous tension, sans savoir à quel tableau électrique remonter pour les mettre hors tension. Le besoin de déployer un réseau VDI moderne rendait une intervention indispensable. Mais cette rénovation lourde entraînait une fermeture du Théâtre pour une période de 18 à 20 mois.
Que faire des spectacles et de la programmation pendant cette période ? La décision fut prise, pour la troisième reprise de la comédie musicale rendue célèbre par le film éponyme Singing in the Rain, de déménager la scène, les coulisses, les gradins et toute la machinerie dans un espace suffisamment grand pour les accueillir. Il n’était bien sûr pas question de déménager physiquement le théâtre mais plutôt de recréer à l’identique, ou presque, tous les éléments nécessaires à la bonne tenue du spectacle.
L’un des problèmes à résoudre était que cet espace devait accueillir la hauteur totale de la scène et des dessous, ainsi que les cintres, soit quasiment 27 mètres de hauteur. La jauge du théâtre étant de 3000 places, il fallait aussi retrouver une capacité identique ou proche. Dans Paris intra-muros, très peu de lieux pouvaient recevoir un tel équipement. Le Grand Palais présentait de nombreux avantages, avec les 13 500 m2 de sa grande nef qui culmine à 60 m au niveau du campanile, pour une hauteur de 35 m sous la charpente. Sa situation ne faisait pas perdre sa centralité au théâtre, bien au contraire, et le lieu était libre de toute exposition pendant la période de fin d’année 2017.
Décision fut prise de « déménager » le théâtre, sa scène, ses gradins et toutes les zones techniques. Il a fallu pour cela relever plusieurs défis techniques liés au gigantisme du projet, à l’emplacement très particulier et à la nécessité d’une mise en place et d’un démontage dans des délais forcément très court.
Trois acteurs ont accepté le challenge. Tout d’abord l’entreprise Layher, un fabricant d’échafaudages allemand, installé de longue date en France et qui se revendique n° 1 européen. Layher a été accompagné par un BE spécialisé dans l’événementiel CAP'CO – Scénium. Et bien sûr les équipes du théâtre du Châtelet.
Il aura fallu d’abord résoudre la question des délais, puisque le lieu était livré vide le 16 novembre, pour une générale 10 jours plus tard, le 26. Deux jours et demi ont été nécessaires pour le montage de l’ensemble de la scène et des cintres, ce qui implique, outre une grande préparation en amont, un ordonnancement des travaux de montage absolument parfait. La scène elle-même posait un problème particulier puisqu’il a fallu la dissocier de l’ensemble du reste de la structure. En effet elle est équipée d’une « piscine » destinée à recevoir 1,8 tonne d’eau. Cette eau va arroser la célèbre scène qui donne son nom à la pièce musicale. La structure qui compose la scène a été dissociée de l’ensemble et posée sur des roulettes, ce qui a permis de l’installer indépendamment du reste de la structure.
Ensuite, les cintres qui culminent à quelques mètres de la verrière et du fameux vert Réséda de la structure métallique ont été installés par une grue géante, plus à l’aise sur les chantiers extérieurs habituels qu’à l’intérieur d’un bâtiment classé à l’inventaire des monuments historiques. Précisons enfin que la scène et l’avant-scène sont à l’identique du théâtre.
Ce sont 98 personnes qui ont réalisé cet exploit en à peine deux jours et demi. Les équipes de Layher et de ses partenaires ont travaillé dans des conditions moins exposées que sur un chantier extérieur, mais avec des contraintes de délai et d’accessibilité autrement plus importantes. Et le démontage s’effectuera à peu près avec les mêmes contraintes.
Pour Layher ce n’est pas un coup d’essai puisque l’événementiel pèse entre 10 à 15 % de son chiffre d’affaires. Mais, précise Éric Limasset, président de Layher France, « C’est un chantier exceptionnel et prestigieux, comme nous n’en rencontrons que tous les 4 à 5 ans ». Il ne reste plus qu’à réserver des places pour assister au spectacle, en sachant que les échafaudages ont su se fondre derrière les décors pour laisser place à la magie d’une des comédies musicales les plus célèbres.
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