SNBC, PPE, CITE : Coénove fait le point !
Adoptée en 2015, la première Stratégie nationale bas-carbone (SNBC) visait une baisse de 75% des émissions de gaz à effet de serre de la France à l’horizon 2050 par rapport à 1990. Rapidement, le Gouvernement s’est fixé un nouvel objectif, celui d’atteindre la neutralité carbone, un projet qui a conduit à la révision de la SNBC. Bien que toujours « à l’étape projet », le texte présenté en décembre 2018 ne semble pas convaincre l’ensemble des parties prenantes des secteurs du bâtiment et de l’énergie. Pour l’association Coénove, aussi bien la SNBC que la PPE (Programmation pluriannuelle de l’énergie), vont conduire à une « électrification massive ». « Il y a un choix totalement affiché d’électrification des usages pour les années qui viennent » et « une marginalisation du gaz », pointe ainsi Bernard Aulagne, son président.
Il estime « surprenant et dommageable » que pour faire face aux pics de consommation d’électricité en période hivernale, il soit préconisé d’utiliser du gaz pour fabriquer de l’électricité « plutôt que de l’utiliser directement pour chauffer des logements ». « Ça veut dire qu’il y a des ressources de gaz renouvelable qui seront utilisées pour fabriquer de l’électricité, alors qu’on pourrait directement les injecter dans le réseau, et ce serait plus utile ». « On vit dans un système électrique tendu, et donc c’est quand même très paradoxal de penser à une électrification ».
Pour montrer qu’il existe « une autre voie pour atteindre la neutralité carbone », Coénove a réalisé une étude prospective avec Artélys. « Nous avons montré que le scénario SNBC tel qu’il est proposé, conduit à une augmentation de la pointe électrique de 12 GW par rapport au plus haut niveau historique de la pointe électrique, qui a été de 102 GW en 2012 ».
L’association appelle donc à une moindre électrification, à une meilleure prise en compte de la place du gaz et notamment du gaz renouvelable. « Il faut savoir que nous sommes aujourd’hui à plus de 100 installations qui injectent » contre une quarantaine en début d’année 2019, précise M. Aulagne. « Nous sommes vraiment sur une croissance extrêmement forte ». Plus de 1 000 projets ont été identifiés dans la file d’attente pour un potentiel supérieur à 21 TWh. « Tout ceci nous met une perspective de production à l’horizon 2023 au-dessus de la trajectoire qui a été retenue dans l’actuelle PPE. Nous restons sur un objectif de 10% de gaz renouvelable pour 2030 même si la filière est persuadée que nous pouvons faire plus ».
Transformation du CITE en prime
Concernant la réforme du CITE, Bernard Aulagne se dit « favorable à cette décision qui va donner plus d’efficacité au dispositif » mais espère que le projet de loi de finances 2020 évolue.
S’il comprend « le fait de recentrer le dispositif sur ceux qui en ont le plus besoin pour arriver à financer les travaux avec un reste à charge minimum », il regrette que le CITE soit « quasiment supprimé pour les déciles 9 et 10 ». Il soutenait d'ailleurs une des propositions entendues à l’Assemblée qui consistait à garder un dispositif à la rénovation globale pour ces ménages, un amendement qui n’a finalement pas été retenu.
« Là où nous ne sommes absolument pas d’accord, c’est sur le fait que la chaudière à très haute performance énergétique (THPE) ne fasse plus l’objet d’accompagnement et d’aides sur les déciles 5 et 8 ». « Il y a une démarche totalement incohérente puisque l’enjeu est d’accélérer le renouvellement du parc. Aujourd’hui, sur les 8,5 millions de chaudières individuelles, seules 30% sont à condensation. Il y a gisement extrêmement important à portée de main pour diminuer la facture et les gaz à effet de serre sur ce secteur ».
Encourager les travaux
La démarche « Mon Étiquette Chaudière » présentée en octobre dernier vient répondre à ce besoin de renouvellement du parc de chaudières. Lancée en partenariat avec l’association Énergies & Avenir, l’initiative est partie d’un « constat partagé qu’il y avait un besoin d’améliorer l’information des particuliers sur l’état de leur chaudière. Les nouvelles chaudières fabriquées depuis 2015 sont étiquetées mais tout le parc d’anciennes chaudières ne disposent d’aucune visibilité sur son état et ses performances intrinsèques. Donc il a été décidé de mettre en place cette démarche que nous avons voulu la plus simple possible ».
La démarche vise ainsi à sensibiliser les particuliers afin qu’ils anticipent le remplacement de leurs équipements. Bernard Aulagne rappelle que le simple changement d’une chaudière standard pour une chaudière THPE permet de générer « 30% d’économies d’énergie. Cela fait partie des gestes les plus efficaces, les plus pertinents ».
Les professionnels ont particulièrement bien réagi au lancement de cette démarche qui va s’accompagner d’une forte campagne d’information et de communication. Ce sera en effet aux professionnels d’informer les particuliers sur la performance et l’état de leur chaudière lors des visites d’entretien.
Bernard Aulagne revient enfin sur l’engagement de la filière dans la démarche FAIRE. « C’est une dynamique qui se poursuit puisqu’effectivement nous travaillons en contact régulier et très proche avec le Plan Bâtiment Durable. Nous croyons véritablement aux objectifs, à l’enjeu de rénovation énergétique ». L’association se dit également consciente de « la difficulté à mobiliser tous les acteurs de la rénovation » et de l’importance de créer un environnement de confiance.
« La rénovation énergétique a besoin de visibilité et de stabilité pour que les ménages s’engagent », insiste Bernard Aulagne qui s’oppose à toute remise en question des aides de l’Anah. « Nous sommes ravis qu’une dizaine de nos adhérents aient souhaité relayer cet engagement et continuent sur le terrain à promouvoir une rénovation énergétique de qualité ».
Rose Colombel
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