Au sein des entreprises du bâtiment, la menace des pénuries plane toujours
Jeudi 21 avril, l’Institut National de la Statistique et des Études Économiques (INSEE) diffusait son enquête mensuelle sur la santé économique des entreprises du bâtiment. Réalisé entre ce 28 mars et ce 15 avril, le rapport retient en avril une légère progression du climat d’affaires, l’indice passant de 113 à 116 depuis ce début d’année.
Autre indicateur de bonne santé économique du secteur : « les entrepreneurs du bâtiment estiment que leurs carnets de commandes assurent 8,6 mois de travail, une durée aussi élevée que le mois précédent et qui demeure nettement au-dessus de sa moyenne de longue période (5,9 mois) », précise l’INSEE.
Il n’empêche que les chefs d'entreprise semblent de moins à moins nombreux à se montrer optimistes quant à leur activité. L’indicateur passe en effet de 2 en janvier à -2 en avril, bien qu’il se maintienne au-dessus de la moyenne (-21). L’imprévisibilité de l’évolution des affaires se confirme également, le solde d’entrepreneurs dans l’incertitude doublant presque, passant de 7 à 13 de janvier à avril.
Les difficultés d’approvisionnement pèsent davantage
Il faut dire que les tensions sur l'approvisionnement n’arrangent pas les affaires des entreprises du bâtiment. Si une accalmie côté industriels était envisagée en début d’année, le conflit russo-ukrainien est venu plomber la disponibilité des matières premières, en particulier du côté de l’acier.
L’impact se mesure en partie dans l’enquête de l’INSEE en avril, où la stabilité des taux d’utilisation des capacités de production atteint 92,6 %. Soit plus que la moyenne de longue période (88,8 %) mais légèrement moins que le taux constaté début 2022 (93 %), ce que l’INSEE interprète comme une évolution « quasi-stable ».
« Un peu plus de la moitié des entrepreneurs se disent dans cette situation, contre un tiers en moyenne de longue période. Plus précisément, un peu moins d'un quart des entrepreneurs se disent à la fois incapable d'accroitre leur production en cas de commandes supplémentaires et face à des difficultés faute de personnel, une part quasi stable et plus forte qu'en moyenne. La part des entrepreneurs ne pouvant accroître leur production et qui connaissent des difficultés d’approvisionnement est en hausse ce mois-ci. Elle atteint son plus haut niveau depuis que cette série existe (1990) », précise l'institut.
Pour preuve, les limites de production rencontrées pour difficultés d’approvisionnement concernent 39 % des entreprises, soit +9 points comparé à janvier 2022.
Pour vous tenir au courant sur les pénuries de matières premières dans le BTP, rendez-vous sur notre dossier dédié. |
Une hausse des prix inévitable…
Par conséquent, bien que sans cesse repoussée, la hausse des prix des matériaux est la solution envisagée par de plus en plus d'entreprises du bâtiment, afin de se maintenir à flot. Et ce malgré une situation de trésorerie demeurant au-dessus de la moyenne de -10, avec -5 en avril. Parallèlement, le solde de délai de paiement recule de 24 à 21 sur les quatre premiers mois de l’année, soit moins que la moyenne globale de 29.
Toutefois, sûrement pour garder des marges et anticiper d’éventuels investissements dans leurs capacités de production, le solde d’entrepreneurs annonçant une hausse de leurs prix dans les trois prochains mois, monte de 44 à 58 entre janvier et avril.
« Le solde d’opinion correspondant est à son plus haut niveau depuis octobre 1981 », observe l’INSEE. L’institut a d’ailleurs anticipé cette évolution, en réduisant les délais de publication de ses index de la construction, servant de grille de prix aux acteurs du BTP.
De plus en plus de main d’œuvre disponible ?
Autre défi pour les entreprises du bâtiment : le recrutement. En témoignent les 43 % d’entrepreneurs qui font face à des difficultés de production en raison d'un manque de personnel.
Cependant, la part se stabilise sur les quatre premiers mois de 2022. Pareil pour les besoins en recrutement, concernant toujours 75 % des entreprises sondées par l’INSEE depuis le début de l’année.
Meilleure nouvelle encore : le solde d’opinion sur l’évolution passée des effectifs au cours des trois derniers mois emprunte une tendance haussière, voire rebondit. Elle oscille ainsi entre 4 en janvier et 7 en avril, surpassant ainsi légèrement la moyenne (-5). « Le solde sur l’évolution à venir des effectifs pour les trois prochains mois est stable, bien au-dessus de sa moyenne de longue période », conclut l’INSEE.
Virginie Kroun
Photo de Une : Adobe Stock