La nouvelle centrale à béton de Lafarge, actuellement en construction à Nice, ne ressemble en rien aux autres unités de production du leader mondial des matériaux de construction.

Et pour cause, afin d'obtenir un permis de construire dans la Zone d'Opération d'Intérêt National de l'Eco Vallée, Lafarge a dû montrer patte blanche. Le projet en lui-même est assez « unique en son genre », et représente un « véritable défi technique » loin des standards habituels de Lafarge, reconnaît Philippe Malet, directeur Agence Côte d'Azur Lafarge Bétons France.

De par sa conception, tout d'abord. Chose peu courante, Lafarge a fait appel pour sa construction à un architecte de renom, le Niçois Jean-Philippe Cabane (ABC Architectures). Ce dernier s'est notamment illustré dans le projet de l'Edhec Business School à Nice, construit en 4 phases étalées sur 25 ans.

« L'objectif était de recréer une centrale, sans générer de nuisances, sur un site où il y avait déjà eu par le passé une unité de production », explique l'architecte. Pour répondre aux diverses contraintes imposées et cacher au mieux les éléments de production, l'architecte a imaginé un jeu de plusieurs volumes « en boîte », « répondant aux normes HQE (le bâtiment n'est pas encore certifié, ndlr.) ».

Une façade en béton rouge de 18 m de haut

Le premier volume, le bâtiment granulats, se caractérise par une façade de 18m de haut en Agilia rouge, « un béton autoplaçant coloré, peu commun, surtout pour des voiles de grande hauteur », précise Jean-Philippe Cabane.
 
Pour réaliser cette formule, « plusieurs tests ont été nécessaires ». En tout, 7 mois de préparation en amont, le temps de choisir le mode de coulage, tester les temps de prise et dimensionner la grue. «Nous avons finalement opté pour un coulage à la pompe par le haut, à l'aide d'une grue, avec l'insertion de boîtes d'ancrage dans l'armature », détaille Benoît Roncarolo de l'entreprise de génie civile du même nom.
 

« Le but de cette technique est de n'avoir aucune reprise, avec un coulage linéaire dans le temps. Des ouvertures en quinconces vers le voile intérieur permettent d'éviter les projections et le bullage », ajoute-t-il. Pour plus de sécurité, la formule du béton est contrôlée à la sortie de l'unité de production et à l'arrivée, avant coulage, par un laboratoire implanté sur le site.

A l'intérieur, le bâtiment granulat est composé de 12 trémies de 50 m2, avec des éléments intermédiaires de contreventement.

Un bâtiment triangulaire, traité en béton blanc en façade, y sera également adossé, lors d'une seconde phase de travaux qui n'est pas encore programmée, pour l'heure, en raison de l'investissement requis. Il comprendra à terme, un laboratoire d'analyse et une partie des bureaux transférés du siège social.

7 silos de ciment de 100 tonnes

« Les perceptions depuis l'espace public ont été particulièrement soignées sur ce chantier », souligne également l'architecte. « tout comme la maîtrise du bruit, des émissions de poussière, le traitement des déchets et le recyclage des eaux », complète le directeur Agence Côte d'Azur Lafarge Bétons France.

Le bâtiment le plus visible a été traité en béton naturel, avec une façade de 13m de haut, fragmentée par quelques joints. Cette boîte renferme la ligne de production avec un malaxeur de 3m2, ainsi que 7 silos de 100 tonnes. Deux sorties de déchargements permettent aux camions de réceptionner le ciment. Le poste de commande et de maintenance prendra place dans un bâtiment plus petit en béton, agrémenté d'un bardage métallique.
 

Entre les deux, une « coque » recouverte d'un gazon de synthèse permettra de cacher les parties les moins nobles de la construction. Un jeu de lumière est également prévu sur les tuyaux visibles.

Enfin, la cinquième façade a été traitée en béton brut, pour limiter l'impact sur les vues plongeantes. Un écran végétal et des murs en gabion prendront également place autour du site pour casser les vues depuis la route. 

Une centrale évolutive

«Cette centrale est une vitrine de l'ensemble du savoir faire de Lafarge, pour mettre en valeur le béton», précise Philippe Malet, directeur Agence Côte d'Azur Lafarge Bétons France. Une vitrine qui a coûté tout de même 4,5 millions d'euros, alors qu'une centrale classique ne coûte qu'1,5 millions. Le site emploiera une dizaine de personnes et permettra de créer une quizaine d'emplois indirects supplémentaires, selon le groupe.

Son exploitation devrait démarrer en septembre 2016, avec une capacité de production de 70 000 m3 par an, pour l'instant. Car le bâtiment se veut évolutif, « une seconde ligne de production pourra prendre place dans le futur, au sein du bâtiment malaxeur, afin d'accompagner une croissance d'activité », précise le directeur. 

En effet, la zone est dynamique. La centrale est située à proximité du futur éco-quartier de la Plaine du Var, qui devrait engloutir des milliers de m3 de béton dans les années à venir.
 

© Lafarge-ABC Architectes

Claire Thibault
© Photo de Une : Lafarge-ABC Architectes/Autres photos : C.T