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Le destin compliqué de la maison de l’Iran

Publié le 21 janvier 2002

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La maison de l’Iran, dernière construction en date de la Cité universitaire de Paris, a eu bien de la peine à voir le jour. Rien d’oriental dans son architecture, elle emprunte, au contraire, à la plus extrême modernité
Le destin compliqué de la maison de l’Iran - Batiweb
C’est une histoire folle, comme on les aime souvent en architecture. Au départ, il y a le vœu du Shah d’Iran : qu’un pavillon représente son pays dans la fameuse Cité universitaire de Paris. Nous sommes alors au début des années soixante. Le projet est logiquement confié à deux architectes iraniens, Moshen Foroughi et Heydar Ghiai. On ne saura jamais quelle était la teneur du projet initial, mais, les autorités administratives françaises effrayées, refusent instantanément les plans des 2 créateurs. Pas découragés, ceux-ci font alors appel à André Bloc, le fondateur d’ "Architecture aujourd’hui" qui leur propose les services d’un jeune architecte, Claude Parent. Celui-ci s’empresse à son tour de défaire le projet initial pour le remonter à sa manière. Motif officiel de ce changement radical : le bâtiment se serait rapidement effondré sur les carrières qui s’ouvrent sous sa surface. André Bloc et Claude Parent, sur la base de six puits de 2 m de diamètre et de 25 mètres de profondeur, érigent alors trois portiques parallèles de 38 mètres de long, capables de supporter un immeuble de huit étages en deux blocs de quatre. Entre les deux, ils imaginent un vide “ structurant ” comprenant les appartements du directeur et quatre chambres. Comme l’immeuble est en bordure des huit voies du périphérique parisien, ils imaginent une façade aveugle pour isoler le bâtiment du bruit et un escalier extérieur en spirale pour habiller l’une des façades. Cette architecture spectaculaire, voire futuriste pour l’époque, est repoussée illico par les autorités administratives. Alors que les banlieues parisiennes se couvrent de barres sans âme que l’on commence déjà à nommer poulailler, les fonctionnaires de l’urbanisme ne veulent entendre parler ni d’orientalisme ni d’avant-gardisme en matière d’architecture. Pourtant, au centre de la Cité U quelques immeubles, dont le pavillon chinois, revendiquent fièrement leurs origines culturelles.
Le piston diplomatique
On aurait pu en rester là et repartir dans la spirale des projets quand une visite annoncée du Shah d’Iran relance brutalement l’affaire. Le monarque entend bien poser lors de son passage, la première pierre de la maison de ses étudiants. Le Quai d’Orsay, affolé, transmet illico sa panique aux services d’architecture concernés. Diplomatie oblige, le temps d’un claquement de tampon officiel, le permis est accordé. Les travaux commencent, mais l’administration, rancunière et revancharde, ne baisse pas les bras pour autant. Ses responsables attendent, ils savent qu’à un moment ou un autre, de funestes grains de sable viendront enrayer la construction provocante et pistonnée. Cela ne tarde pas. Ainsi, une commission de sécurité oblige à modifier certains aspects du bâtiment, notamment l’ascenseur extérieur qui est réintégré au centre du pavillon. Pour augmenter la résistance au feu, les pompiers exigent que les architectes ajoutent du béton dans les planchers, alourdissant d’autant la structure. Ce qui sera fait. Bon an, mal an, l’immeuble voit le jour. Ses proportions ne sont plus celles prévues par les plans et l’esprit des architectes disparaît. Mais qu’importe, il est inauguré en 1968. Les services urbains auront eu, à leur façon, le dernier mot. Avec le temps, le pavillon de l’Iran est devenu un jeu de cubes sans grande identité, invisible aux yeux des passants. Les normes qui lui ont été imposées en font aujourd’hui un gouffre financier en matière de chauffage. Les salles sont vastes mais inadaptées à l’usage initial. En revanche, son emplacement en bordure du périphérique en fait l’un des meilleurs supports publicitaires de l’autoroute urbaine. Un atout qui se paie assez cher et qui permet d’assurer pour partie son entretien. Rebaptisée Fondation Avicenne en 1972, la maison de l’Iran accueille aujourd’hui des chercheurs et des postdoctoraux de toutes nationalités. Les successeurs du Shah d’Iran, peu portés sur l’architecture post-moderne des années soixante, ne revendiquent plus depuis longtemps leur paternité, sur une construction probablement devenue pour eux, bien trop occidentale…

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