Sans cesse reportée, la généralisation du Livret A arrive au Parlement
Le dossier traînait depuis janvier 2005. C'est le Crédit Agricole qui a le premier lancé la charge en saisissant la Commission européenne de cette "entrave à la libre concurrence".

Un rapport sur la réforme est commandé à l'ancien gouverneur de la Banque de France, Michel Camdessus, qui dresse un constat très pessimiste du système actuel, jugé "en survie précaire". Le financement du logement social grâce à l'argent des Livrets A est plus coûteux qu'un appel au marché par l'émission d'obligations d'Etat, souligne M. Camdessus. Et la collecte a tendance à s'éroder au moment même où "les besoins du logement social explosent", dit-il.
Reprenant plusieurs points du rapport, la ministre de l'Economie, Christine Lagarde, engage alors une vaste refonte du système: banalisation au 1er janvier 2009, baisse de la rémunération des banques pour la collecte, période de transition pour les réseaux actuellement distributeurs (dont le Crédit Mutuel pour le Livret Bleu), obligation pour la Banque Postale de continuer à ouvrir un Livret A à toute personne qui en fait la demande.
La réforme bute cependant sur deux points. Mme Lagarde veut abaisser la rémunération perçue par les banques à 0,4% des encours, contre 1,12% actuellement, afin d'économiser un milliard d'euros pour le logement social. Car plus la rémunération des banques est faible, plus le taux des crédits aux organismes HLM est bas. Mais face à la grogne des banquiers (qui voulaient 0,8%), Mme Lagarde doit faire marche arrière et leur céder 0,6%.
Elle donne en outre aux banques la possibilité de conserver 30% des fonds épargnés, qui ne seront plus centralisés à la Caisse des dépôts. L'objectif affiché de cette mesure est d'éviter une "cannibalisation" de la ressource, en incitant les banques à la collecte: la crainte était de les voir se servir du Livret A pour attirer des clients puis les orienter vers d'autres placements plus intéressants. "Cadeau pour les banques", "menace pour le logement social", accusent les détracteurs de la réforme, réunis dans le collectif "Pas touche au Livret A". Même Jean Peyrelevade, l'ancien président du Crédit Lyonnais, fustige les concessions faites aux banques: "Le Livret A n'a pas besoin de cela pour intéresser les banquiers" puisque c'est "un produit d'appel incontournable pour séduire les clients".
Les grandes compagnies d'assurance semblent lui donner raison. Elles viennent, par la voix de la Fédération française des sociétés d'assurance, de demander le droit de le distribuer.