Les PME confrontées à des restrictions de crédit
Jean-François Roubaud, le président de l'organisation patronale des PME (CGPME), a dressé lundi un tableau sombre.
Les difficultés croissantes de financement touchent toutefois tous les secteurs d'activité selon les témoignages livrés lundi par les chefs d'entreprise adhérents de la CGPME.
Brigitte Macherez, à la tête d'une entreprise de transformation du bois, la Soisonnaise des Bois employant 7 personnes, a ainsi fait état "de difficultés croissantes depuis un an et demi à obtenir des crédits commerciaux", une remontée des conditions de prêts et des frais bancaires élevés lors de dépassements de l'autorisation de découvert de 20.000 euros. "Nous avons récemment fait un emprunt pour renouveler un véhicule utilitaire comme nous le faisons tous les deux ans, les taux qui nous ont été proposés sont passés de 4,4% à 5,93% auprès de notre banque et même 6,30% auprès d'un autre établissement que nous avons sollicité", a-t-elle dit.
EN ATTENDANT LES MESURES ÉTATIQUES
Dominique Boudier, dirigeante de Show Page, une PME de Vélizy Villacoblay en région parisienne, créée en 1996 et spécialisée dans l'équipement des entreprises en machines d'impression avec 1,5 millions de chiffre d'affaires annuel et 3 collaborateurs, a eu le malheur d'évoquer un moins bon positionnement de son entreprise qu'en 2007 lors d'un échange téléphonique avec l'assureur-crédit Sfac.
"La Sfac a coupé par deux tous nos encours. On est presque dans l'impossibilité de livrer nos clients même si on en a", a-t-elle dit alors que l'assureur-crédit rachète aux grossistes informatiques les factures Show Page, contribuant ainsi au financement de son activité de revente d'imprimantes.
"J'ai appelé ma banque pour avoir un découvert", a-t-elle poursuivi. "Le chargé de clientèle m'a répondu qu'il était en attente des directives étatiques", après les mesures de soutien au financement des TPE-PME annoncées au début du mois.
Le gouvernement s'est engagé à réorienter 17 milliards d'euros d'épargne réglementée de la Caisse des dépôts et consignations vers les prêts bancaires, dont 8 milliards issus du Livret de développement durable depuis le 8 octobre pour les PME de moins de 250 salariés et 9 milliards débloqués le 15 octobre pour les entreprises jusqu'à 5.000 salariés.
Oséo, l'organisme public de financement de l'innovation et des PME, a accru de 5 milliards d'euros ses capacités à raison de 2 milliards supplémentaires pour les prêts aux PME, de 2 milliards supplémentaires pour les garanties de prêts bancaires et de la mise en place d'une garantie de restructuration des découverts de trésorerie à hauteur d'un milliard.
Les abondements de la Banque européenne d'investissement aux prêts bancaires français ont été relevés de moins d'un milliard d'euros à 3 à 4 milliards d'euros par an jusqu'en 2011.
NUMÉRO VERT PRIS D'ASSAUT
"Alors qu'un numéro vert téléphonique a été mis place jeudi dernier par Oseo, le lendemain midi 5.000 appels avaient déjà été enregistré pour la seule région Ile-de-France", a souligné Jean-François Roubaud qui est également administrateur d'Oseo.
Le soutien d'Oseo n'a toutefois pas été jusqu'à ces derniers jours une assurance pour obtenir un prêt bancaire.
Olivier Fély-Biolet, dirigeant d'une TPE spécialisée dans le conseil en organisation et en ressources humaines et implantée à Amiens et Marseille, avait ainsi obtenu un engagement de sa banque pour un prêt de 20.000 euros représentant la moitié d'un concours de 40.000 euros dont le solde devait être apporté via le Conseil régional, le tout avec une garantie Oseo.
Il entendait ainsi financer son développement et l'embauche de 2 salariés alors que son chiffre d'affaires a progressé de 144% l'année dernière à 134.000 euros, lui permettant de dégager un résultat positif: sa banque est revenue sur son engagement.
Benoît Jefoug, dirigeant de 720° The Telecom Factory, une entreprise située à Troyes dans l'Aube et spécialisée dans la construction d'infrastructures télécoms dédiées, s'est vu refuser tout récemment un crédit qui lui avait été accordé cet été alors qu'il double son CA tous les ans depuis cinq ans.
"Nous avions un accord de principe cet été pour le rachat d'une entreprise. Tout a changé depuis. Les banques ne veulent pas financer d'immatériel. Au vu des 800.000 euros que nous avions sur notre compte, le banquier nous a suggéré de nous autofinancer!", a-t-il regretté.
Pascal Claverie, gérant d'une holding contrôlant quatre filiales spécialisées dans le traitement de surfaces pour l'industrie qui réalisent 8 millions d'euros de chiffre d'affaires, a été confronté à un durcissement des conditions, même si le financement attendu n'a pas été remis en cause.
Il y a un an, il avait obtenu pour sa filiale Applications de l'Electrolyse - située à Briare dans le Loiret et spécialisée notamment dans le chromage avec 22 salariés - un accord pour un prêt de 450.000 euros sur un investissement de 800.000 euros.
"Finalement, le prêt m'a été consenti mais à des conditions moins avantageuses que celles négociées initialement", a-t-il dit en énumérant toute une série d'ajouts.