Le bailleur social Logirep devant la justice pour discrimination raciale et fichage ethnique
Le renvoi de Logirep devant le tribunal fait suite à une plainte, en 2005, de l'un de ses locataires, un homme d'origine ivoirienne qui s'était vu refuser, en juillet 2005, un trois pièces dans une tour de Nanterre. La société HLM, qui gère quelque 36 000 logements, avait été visée par une enquête après le dépôt de plainte pour discrimination raciale de ce demandeur, qui avait été mis en contact avec le bailleur par son employeur, la RATP, et qui avait visité l'appartement, avant d'apprendre que son dossier était rejeté par le commission d'attribution des logements.
Les origines raciales réunies dans un fichier
Une employée de Logirep lui avait alors expliqué qu'il était « d'origine africaine et qu'il y avait déjà assez de Noirs dans cette tour ». La conversation téléphonique enregistrée par la mère du plaignant, qui vivait avec ce dernier, avait été versée au dossier et conduisait quelques mois plus tard à l'ouverture d'une information judiciaire.
Lors de leurs auditions, les quatre membres de la commission d'attribution avaient affirmé avoir écarté son dossier car le logement qu'il souhaitait quitter n'était pas insalubre, contrairement à ce qu'il prétendait, et que par conséquent sa demande n'était pas prioritaire. Ils pointaient également que la mère du plaignant avait occasionné des troubles de voisinage et qu'en outre ce nouveau logement l'aurait éloigné de son lieu de travail.
Mais au cours des investigations, des documents avaient ensuite montré que Logirep conservait informatiquement un fichier comportant des informations sur les origines raciales de leur locataires, comme "Alg" pour Algérie ou "Gy" pour Guyane, ce qu'interdit la loi. « On ne peut pas dire à quelqu'un que le simple fait d'être noir pose a priori un problème », a réagi Samuel Thomas, délégué général de la Maison des Potes, qui s'est constituée partie civile.
Logirep déplore un acharnement
L'avocat du plaignant, Me Eric Najsztat a demandé 50 000 euros de dommages et intérêts pour son client. « La loi sur la mixité sociale a été élaborée afin de permettre à des classes moyennes de bénéficier d'un logement HLM et de ne pas être écartées », a souligné Samuel Thomas, délégué général de la Maison des Potes, partie civile aux côtés de SOS Racisme.
Du côté du bailleur, on déplore « un acharnement » alors que la direction de Logirep se revendique comme autonome, au regard des décisions prises par la commission d'attribution. « Le refus a été motivé par la commission composée de deux salariés de Logirep et de deux représentants l'un du maire et l'autre des locataires », a souligné Me Christophe Pech de Laclause. « De plus lorsque ces personnes ont été entendues, toutes ont fourni des explications étrangères à l'origine du plaignant », a ajouté le conseil.
Le tribunal de Nanterre a suivi la demande de l'avocat du plaignant et a requis vendredi une amende de 50 000 euros et a aussi demandé l'effacement des données relatives aux origines ethniques des locataires révélées par l'instruction.
B.P (avec AFP)