Tour Montparnasse : pas de reprise des travaux avant mi-2015
Les quelque 300 copropriétaires (sociétés, investisseurs ou particuliers) du célèbre édifice parisien où travaillent environ 5000 personnes, prévoyaient initialement de boucler totalement le désamiantage, entamé en 2006, d'ici quelques années. Mais, après des dépassements des seuils de pollution à la fibre cancérigène (plus de 70 depuis 2009), la préfecture avait demandé en août 2013 à un expert d'en comprendre la cause.
Dans son rapport, remis en janvier, l'expert, André Jacq, avait notamment mis en cause l'organisation des travaux dans les pollutions récentes. La préfecture avait alors demandé aux copropriétaires de créer une cellule dédiée à l'amiante, et annoncé un arrêté prescrivant le cadre permettant une reprise des travaux, suspendus en attendant.
Le désamiantage a déjà coûté 250 millions d'euros
Selon les copropriétaires, la cellule amiante est opérationnelle depuis fin avril. Le nouvel arrêté daté du 15 mai impose notamment une surveillance lourde des taux d'empoussièrement et prévoit une évacuation des locaux au-delà de 5 fibres par litre. Depuis juillet, 1.873 mesures ont notamment été effectuées dans la Tour, avec un seul dépassement accidentel dans un parking, a expliqué André Jacq, présent aux côtés des copropriétaires.
L'arrêté impose aussi des mesures correctrices dans les six mois pour des matériaux amiantés dégradés, 98 points ayant été identifiés selon M. Jacq, mais qui restent dans l'anecdotique, comme par exemple un joint de porte qui pose problème. Selon les copropriétaires, hors travaux, les mesures imposées représentent de l'ordre d'un million d'euros par an, le désamiantage ayant déjà coûté 250 millions d'euros. Au final, ont-ils expliqué, « l'arrêté augmente le niveau de vigilance, de surveillance, de contrôle et d'information des occupants ».
En conséquence, les copropriétaires vont lever le pied sur les travaux et « faire évoluer un peu la doctrine, là où la logique était retrait, retrait, retrait ». D'après eux, tous les experts convergent vers le même avis : dans beaucoup de cas, quand l'amiante est en bon état, il est plus risqué d'y toucher que de le conserver sous surveillance. « Le traitement un peu plus lourd du désamiantage fait que nous allons aborder le sujet avec moins de systématisme, mais toujours dans la logique d'avoir un immeuble plus propre », ont-ils expliqué, soulignant que le retrait d'amiante n'est pas obligatoire lorsque le matériau n'est pas dégradé.
Des remous médiatiques liés à l'amiante
L'expert André Jacq a lui aussi souligné que « des travaux à tous crins pourraient avoir l'effet inverse » de celui escompté. Selon lui, lorsque le désamiantage total avait été déclaré en 2006, les copropriétaires n'avaient pas suffisamment connaissance des contraintes, et aujourd'hui, « on doit viser le plus bas niveau techniquement possible, mais admettre que le zéro n'est pas possible ».
Selon les copropriétaires, les remous médiatiques liés à l'amiante n'ont pas provoqué de nouveaux départs de la Tour, outre ceux de la société Amundi (300 salariés) à l'été et du Conseil régional (200 agents) en janvier. « Les occupants sont dans la Tour au quotidien de manière sereine » ont souligné les copropriétaires, rappelant que l'édifice de 210 mètres de haut est déjà désamianté à environ 90%.
Dans ce dossier, une information judiciaire a été ouverte le 4 octobre par le parquet de Paris, notamment pour mise en danger de la vie d'autrui, tandis qu'une vingtaine de salariés ou ex-salariés ont engagé une action aux prud'hommes pour faire valoir un préjudice d'anxiété. Isolant utilisé dans le bâtiment, l'amiante, cancérigène, pourrait provoquer, selon les autorités sanitaires, quelque 100 000 décès d'ici à 2025.
B.P (avec AFP)