La loi sur le principe « pollueur/payeur » adoptée a minima
Le code de l'environnement prévoit désormais que « les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne les faits portant un préjudice direct ou indirect au territoire sur lequel ils exercent leurs compétences et constituant une infraction aux dispositions législatives relatives à la protection de la nature et de l'environnement ainsi qu'aux textes pris pour leur application » L'ouverture aux collectivités territoriales de ce droit, dont disposent déjà les associations agréées, constituera un progrès pour la protection de l'environnement.
Introduite au Sénat à l'initiative de Bruno Retailleau (NI-Vendée) avec le soutien de Jean Bizet (UMP Manche), maire du Teilleul, rapporteur de la commission des affaires économiques, cette faculté avait été restreinte par le Gouvernement à l'Assemblée nationale aux seuls cas où l'action publique aurait été mise en mouvement par le ministère public.
«L'adoption de ce projet de loi marque l'irruption du préjudice écologique dans notre droit», a affirmé pour sa part le ministre de l'Ecologie, Jean-Louis Borloo. Selon lui, «la responsabilité environnementale, c'est la reconnaissance que les acteurs économiques ne peuvent pas faire subir n'importe quoi à l'environnement sans avoir à réparer les dégâts dont ils sont à l'origine». Le texte voté prévoit, à la charge des exploitants, des obligations précises en matière de prévention et de réparation des éventuels dommages causés aux sols, aux eaux, aux espèces et aux habitats naturels.
La répression de la pollution maritime est également renforcée. Le fait, pour tout capitaine ou responsable à bord d'un navire ou de l'exploitation d'une plateforme, de provoquer un rejet de substance polluante par imprudence, négligence ou inobservation des lois et règlements est désormais puni par 4.000 euros d'amende, jusqu'à 15 millions d'euros en cas de faute intentionnelle.
«Ce texte marque une étape majeure dans la construction d'un cadre juridique capable de répondre aux comportements les plus dommageables pour notre environnement», a estimé la secrétaire d'Etat à l'Ecologie Nathalie Kosciusko-Morizet.
Le concept du pollueur/payeur, au centre de cette loi, avait été mis en lumière après les nombreux cas de dégazage sauvage dont se sont rendus coupables des bateaux au large des côtes françaises. Pour la secrétaire d'Etat à l'Ecologie, cette loi «est un progrès considérable qui a été rendu possible grâce au Grenelle de l'environnement».
Mais pour certaines ONG, l'adoption de la LRE n'est pas le succès incontestable que revendique le gouvernement. «Il était temps qu'elle soit votée car le texte traduit en partie une directive européenne datant de mai 2004», relève ainsi Arnaud Gossement, porte-parole de la fédération France Nature Environnement (FNE) qui regroupe plus de 3.000 associations. La France transpose ainsi une directive du Parlement européen et du Conseil du 21 avril 2004, plus d'un an après la date limite de transposition. Les Etats membres disposaient d'un délai de trois ans pour transposer ce texte en droit interne.
Si FNE reconnaît «des choses positives», l'association regrette néanmoins «une occasion ratée avec une loi qui manque de souffle»: «on avait l'occasion d'envoyer un signal fort et la France se contente d'adapter une directive européenne a minima».
Bruno Poulard (Avec AFP)