La Cour des comptes rend public, mercredi 16 octobre 2013, un rapport sur les certificats d’économies d’énergie commandé par le Premier ministre, en application de l’article 132-5-1 du code des juridictions financières. Assorti de douze recommandations visant à améliorer le dispositif pour la 3ème période.
Sur la période 2006-2012, les certificats d’économie d’énergie ont facilité la réalisation de 3,3 millions d’opérations, essentiellement sur le parc de logements existant de 33 millions de résidences principales et secondaires.
Les objectifs de la première période (du 1er juillet 2006 au 30 juin 2009), qui ne concernait que les vendeurs d’électricité, de gaz, de GPL, de fioul domestique, de chaleur et de froid par réseau, étaient fixés à un niveau faible pour permettre aux acteurs de s’organiser (54 TWh cumac). Ils ont été sensiblement dépassés (65 TWh cumac).
Les objectifs de la deuxième période (du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2013), marquée par un élargissement de la liste des obligés aux fournisseurs de carburants, ont été fixés à un niveau sensiblement plus élevé (345 TWh cumac). Ils seront globalement dépassés2, puisque les résultats à la date du 31 juillet 2013 s’élèvent à 351 TWh cumac.
Toutefois, ce résultat est obtenu en intégrant les certificats en excès de la premièrepériode et ceux délivrés pendant la période transitoire du 1er juillet 2009 au 31 décembre 2009 (109 TWh cumac).
Améliorer l’efficacité des CEE
Trois types d’actions peuvent améliorer l’efficacité des certificats, et augmenter les économies d’énergie de chaque opération qu’ils servent à financer :
- la révision triennale des fiches qui servent à calculer les économies d’énergie des opérations éligibles aux CEE doit permettre de supprimer celles dont l’efficacité est trop limitée ou qui sont rendues obsolètes par l’évolution de la réglementation, du parc ou du marché ;
- un meilleur accompagnement des investisseurs, notamment des ménages, par des conseils plus personnalisés et des diagnostics, permettrait de les inciter à faire des travaux plus performants, notamment dans le cas des rénovations lourdes ;
- la professionnalisation du secteur du bâtiment dans le domaine des économies d’énergie devrait être renforcée de manière à permettre une généralisation de l’éco-conditionnalité pour tous les CEE.
Des mesures de simplification, notamment de standardisation des documents, sont nécessaires pour permettre au pôle national qui gère les procédures de combler le retard d’un an qu’il affiche dans le traitement des dossiers et alléger la charge des obligés et éligibles. Elles doivent être prises dans les meilleurs délais.
Evoluer vers une autre logique
Au-delà, pour la troisièmepériode, le dispositif devrait évoluer vers une autre logique fondée sur un système déclaratif et dématérialisé ainsi que sur des contrôles a posteriori par échantillonnage.
Les transactions effectuées sur le registre EMMY, qui permet d’enregistrer les certificats détenus par les différents acteurs, sont marquées par une absence de transparence sur les prix. Certaines opérations suspectes devraient provoquer une redéfinition des règles de fonctionnement et des contrôles des services concernés.
Le redémarrage d’un marché assurant, grâce à un carnet d’ordres, une transparence des prix demandés et des volumes présentés sur le marché ainsi qu’une garantie des transactions apparait nécessaire au bon déroulement de la troisième période, qui devrait logiquement connaître un accroissement du montant des transactions.
Créés par la loi de programmation fixant les orientations de la politique énergétique (POPE), du 13 juillet 2005, les certificats d’économies d’énergie (CEE) incitent les fournisseurs d’énergie (les « obligés ») à promouvoir l’efficacité énergétique auprès de leurs clients en leur imposant une obligation triennale de réalisation d’économies d’énergie, calculée en fonction de leur poids dans les ventes d’énergie. Cette obligation est chiffrée en kWh cumac1 d’énergie finale.
Les certificats sont créés en majorité par trois grands obligés qui représentent environ 70 % du total des CEE délivrés depuis 2006 : EDF (41 %), GDF (19 %) et Total (11 %).
Récapitulatif des recommandations 1. rendre obligatoires les études a posteriori auprès des obligés pour améliorer la connaissance des économies « réellement » obtenues grâce aux opérations financées par les CEE ; 2. procéder à la révision triennale des fiches et des calculs qu’elles contiennent, notamment à partir des résultats constatés, pour supprimer celles qui sont rattrapées par la réglementation ou dont l’efficacité est trop faible, notamment du fait de l’évolution du parc ou du marché ; 3. renforcer la professionnalisation du secteur du bâtiment à la fois par une inscription dans une logique de moyen terme du programme FEEBAT et la généralisation de l’éco- conditionnalité comme condition nécessaire à l’obtention d’un CEE ; 4. apporter à court terme des simplifications au dispositif local du programme « Habiter mieux » ; 5. préciser l’objectif à atteindre en matière de CEE « réalisés au bénéfice des ménages en situation de précarité énergétique » (article L. 222-1 du code de l’énergie) et mettre en place un dispositif de quota ou de bonification qui oriente les acteurs vers cet objectif ; 6. créer une instance de concertation réunissant tous les acteurs (administrations, représentants des obligés et des éligibles, ATEE, associations), afin d’assurer un dialogue permanent entre les intervenants ; 7. engager immédiatement et par sondage les contrôles a posteriori prévus par les textes et qui n’ont jamais été mis en œuvre ; 8. àcourtterme,mettreenplacelessimplificationsnécessairesen terme notamment de standardisation des documents; la direction générale de l’énergie et du climat (DGCE), « pôle national des certificats d’économies d’énergie » (PNCEE) ayant déjà travaillé sur ce sujet, leur mise en œuvre pourrait être rapide ; 9. pour la troisième période, passer à une architecture différente fondée sur le triptyque dématérialisation/système déclaratif/contrôle a posteriori par échantillonnage ; 10. développer le dispositif des « passeports énergétiques » sous forme d’un programme au sens de l’article L. 221-7 du code de l’énergie, afin de mieux cibler les logements visés et les travaux prioritaires et accompagner la démarche des ménages ; 11.renégocier les conditions de la délégation de service public du gestionnaire du registre EMMY ; 12.assurer la transparence et la sécurité des transactions, en séparant les fonctions d’enregistrement des certificats et la gestion des transactions, en assurant la visibilité de celles-ci (prix, quantités, effectivité des transactions). Si les volumes échangés le justifient, privilégier la relance d’un véritable marché. |
L.P