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Droits de douane : « Notre modèle de production locale est un atout » (Tarkett)

Publié le 15 avril 2025

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La hausse des droits de douane prévue par l’administration américaine risque de changer la donne pour les industriels. Chez Tarkett, spécialiste des revêtements de sols, ce contexte valide un choix stratégique : produire là où l’on vend. Entretien avec son dirigeant, Fabrice Barthélemy.
Droits de douane : « Notre modèle de production locale est un atout » (Tarkett) - Batiweb

Pouvez-vous nous rappeler les grandes lignes de l’activité de Tarkett ?

 

Fabrice Barthélemy : Nous sommes un groupe mondial avec une forte implantation internationale. Plus de 50 % de notre activité se fait en Amérique du Nord, essentiellement aux États-Unis, un tiers en Europe, et le reste en Asie et en Amérique du Sud. Notre stratégie repose sur la production locale : nous fabriquons, autant que possible, dans les régions où nous vendons.

Par exemple, 80 % des produits que nous vendons en Amérique du Nord sont fabriqués sur le territoire américain. C’est également vrai pour notre activité dans le sport. Cette organisation permet d’être plus proche de nos clients, de réduire notre dépendance aux chaînes d’approvisionnement mondiales, et d’améliorer notre réactivité.

 

Les tensions commerciales actuelles, sur les droits de douane notamment, ont-elles un impact sur vos activités ?

 

Fabrice Barthélemy : L’impact immédiat, c’est surtout une grande incertitude et une volatilité extrême. On ne peut pas réagir à chaque annonce de l’administration américaine. Pour l’instant, tout le monde est dans le flou, donc notre priorité est de rester vigilants, de garder le cap et de ne pas sur-réagir.

Ce climat incertain valide même notre modèle de production locale. Il est aujourd’hui un atout et plus pertinent que jamais. Mais on ne peut pas déplacer une usine du jour au lendemain, donc on a besoin d’une certaine stabilité pour adapter notre stratégie industrielle à plus long terme.

 

Quels effets ces droits de douane pourraient-ils avoir sur la filière bâtiment ?

 

Fabrice Barthélemy : Ce qui m’inquiète le plus, c’est un éventuel ralentissement de l’économie. Aux États-Unis, il y a un risque d’inflation importée, de hausse des taux d’intérêt, et donc d’un affaiblissement de la demande.

La construction résidentielle, par exemple, est déjà au plus bas depuis 2 à 3 ans. L’autre effet possible, c’est un afflux de produits asiatiques en Europe, si les exportations vers les États-Unis deviennent plus difficiles. Cela pourrait provoquer un dumping dangereux pour notre industrie.

Et nous travaillons avec la filière pour alerter l’Union Européenne sur ce risque. En même temps, cette crise peut aussi être une opportunité de revaloriser les chaînes de production locales.

 

Vos activités en France et en Europe sont-elles également menacées par un ralentissement de l’activité ?

 

Fabrice Barthélemy : C’est une possibilité. Pour l’instant, nous ne constatons pas encore une baisse significative des volumes ou des commandes, mais nous nous y préparons. Tous les acteurs sont en observation, dans l’attente de voir comment la situation évolue.

Le mot d’ordre, c’est la prudence : nous évitons de gonfler les stocks et restons prêts à réagir.

 

Quels conseils donneriez-vous aux autres acteurs du secteur pour limiter les effets de cette crise ?

 

Fabrice Barthélemy : Je crois beaucoup à la force des organisations décentralisées. En période d’instabilité, il est essentiel de pouvoir prendre des décisions au plus près des clients et des sites de production. Il faut aussi valoriser la production européenne, qui est compétitive et performante, y compris sur le plan environnemental. À condition, bien sûr, que tout le monde joue avec les mêmes règles, ce qui n’est pas toujours le cas, notamment face à certains fabricants asiatiques.

Cette crise est une opportunité de renforcer les circuits-courts et de faire de l’Europe un fournisseur de choix, notamment pour les distributeurs.

Chez Tarkett, nous avons adopté cette logique depuis longtemps : 90 % de ce que nous vendons en Europe y est aussi produit. Quand on parle de délocalisation, il ne s’agit pas forcément de la France, mais de l’Europe comme un ensemble industriel intégré.

 

Par Marie Gérald

Photo de une : Fabrice Barthélemy

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