Grande oubliée des énergies vertes, la filière biomasse se structure
La biomasse : grande oubliée des énergies renouvelables ? C'est ce que soutient une étude Xerfi publiée vendredi. Face à l'éolien et au solaire, le soutien de cette énergie verte semble en effet délaissé. Les bioénergies vont pourtant « devoir contribuer à près de la moitié des efforts du pays en matière de développement des énergies renouvelables », selon le cabinet d'étude. Quels sont donc les freins à son développement ? L'implication des pouvoirs publics tout d'abord. Les récents appels d'offres de production d'énergie biomasse lancés par l'Ademe et la CRE (Commission de régulation de l'énergie) ont connu un succès certain. Mais « le taux de non-réalisation des investissements reste anormalement élevé », tempère Xerfi. Les raisons : des problèmes de financement, le complexe accès à la ressource (en particulier bois et déchets de bois), ou encore les difficultés des porteurs de projets pour modifier le cahier des charges une fois les projets validés...
En matière de bois énergie, de plus en plus utilisé par les industriels, les collectivités et autres acteurs du tertiaire, le principal blocage est lié à la structuration même de la filière. En effet, « la filière bois énergie est en plein essor, mais manque encore de structuration », note un communiqué d'Alcimed, société de conseil et d'aide à la décision spécialisée dans les sciences de la vie. Explication : « ce manque de structuration est dû au fait que la forêt française appartient aujourd’hui pour les 3/4 à des propriétaires privés qui possèdent des parcelles en majorité de petite taille, morcelées et donc difficilement exploitables ». De même, « les exploitants de forêts sont encore nombreux et dispersés ».
Restructuration des nombreux acteurs
« La filière biomasse se compose d'une kyrielle d'opérateurs », complète Xerfi. « Pour le bois (ou biomasse solide), l'arrivée de nouveaux entrants se précise à la fois en amont et en aval de la filière ». Un segment qui reste dominé par Dalkia et GDF Suez – Cofely, « deux groupes aux stratégies opportunistes », selon le cabinet d'étude. Les acteurs issus du monde des déchets – Veolia Environnement et Suez Environnement en tête – « se développent dans la biomasse conformément à leur stratégie globale », à savoir diversifier les modes de traitement des déchets à travers notamment la méthanisation.
La filière est donc en train de se restructurer. Les exploitants de forêts augmentent leurs capacités de production et de commercialisation du bois énergie. Les exploitants locaux se regroupent en coopératives pour pouvoir investir dans des plateformes de production de bois énergie (broyage, séchage, stockage du bois). De leur côté, les exploitants de chaufferies (Cofely, Dalkia, etc.) se positionnent en amont via des filiales d'approvisionnement de leurs équipements, précise Alcimed. En fin de chaîne, les sociétés de recyclage« collectent et commercialisent les plaquettes industrielles et le bois de récupération ». Si la filière évolue, il semble donc que nous soyons encore loin d'un cycle fermé, qui ne produirait que des déchets à valeur ajoutée.
La filière biomasse en France Plaquettes forestières, copeaux et sciures de bois, ordures ménagères, boues d'épuration, déchets de l'industrie agroalimentaire, etc., sont autant de combustibles étiquetés biomasse, rappelle Xerfi. Celle-ci représente aujourd’hui plus de 50% de la production d'énergie verte en France, du fait de l'importance du bois de chauffage dans les foyers. La production d'énergie biomasse est assurée à plus de 80% par le bois énergie. De plus, précise le cabinet, plus d'un tiers de la production d'électricité issue des énergies renouvelables provient de la biomasse. Comme le rappelle Alcimed, « l'engouement pour cette énergie provient surtout des aides financières octroyées par l'Ademe (…) mises en place pour atteindre les objectifs fixés par le Grenelle de l'environnement ». Entre 2009 et 2012, l'Agence a ainsi consacré un milliard d'euros de subventions au programme Fonds Chaleur, dont environ une moitié est consacrée à la biomasse. |
Laurent Perrin