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Cradle to Cradle : les industriels français s'y mettent

Publié le 14 avril 2011

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Emboitant le pas aux américains, les industriels français découvrent le « Cradle to Cradle ». Parmi eux Desso et Tarkett, qui pensent désormais leurs produits pour qu'ils intègrent un cycle de production minimisant les déchets, et proposent leur remplacement en fin de vie.
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Imaginez un monde où les produits manufacturés seraient pensés dès le départ pour être entièrement démontables en fin de vie. Ainsi chacun des éléments qui les composent pourraient être réintroduits dans un nouveau cycle et les déchets disparaîtraient petit à petit. S'inspirant de la nature elle-même, les penseurs de la philosophie « Cradle to Cradle » ("du berceau au berceau", par opposition au cycle usuel de berceau à tombeau) ont imaginé une industrie où tous les matériaux pourraient être classés entre nutriments biologiques (retournés à la terre) et nutriments technologiques (réintroduits dans le circuit de production). Belle utopie nous direz-vous ? Détrompez-vous, certains industriels ont d'ores-et-déjà commencé à appliquer cette doctrine à travers le monde.

Être moins mauvais, un premier pas

Parmi eux le fabricant français de moquettes pour le secteur tertiaire Desso, qui milite « pour que les déchets d'aujourd'hui soient les matières premières de demain », selon les mots de Lionel Pitot-Belin, Cradliste convaincu. Réaliste cependant, il tempère : « On ne va pas changer le monde, mais si on emmène d'autres industriels avec nous, on peut faire bouger les choses ». Concrètement, chez Desso on "est" Cradle to Cradle (C2C) depuis 2008, niveau Silver. Mais les efforts portant sur la consommation d'eau, la production d'énergie et la gestion des déchets sont fournis depuis 15 ans. Ainsi la nouvelle sous-couche EcoBase, en remplacement des sous-couches bitume, est entièrement recyclable (à 98%) par son fabricant après séparation. C'est ce que les auteurs du manifeste C2C* appellent "sous-cycler", ou « être moins mauvais ». Un premier pas encourageant donc...

Même approche chez Tarkett, le spécialiste du revêtement de sols, également l'un des premiers industriels français à avoir adopté la démarche. « Nous procédons à une analyse du cycle de vie de nos produits afin d'aboutir à une amélioration incrémentale du cycle de production », nous confie Anne-Christine Ayed, responsable Recherche, innovation et environnement de la marque. Tarkett analyse ainsi tous les composants d'un produit, y compris ceux composés d'autres produits, en remontant à la source, pour choisir la meilleure voie, quitte à remplacer certains produits. Et les nouveaux produits sont conçus pour s'inscrire dans l'une des deux voies, la biologique ou la techno. Et le son de cloche est le même que chez Desso : « on ne peut pas entrer dans la démarche Cradle to Cradle en entreprise isolée. Cela marchera plus il y aura d'entreprises impliquées », confirme la responsable R&D.

Récupérer les produits en fin de vie

Dans la philosophie Cradle to Cradle, l'étape suivante consiste à déployer un système de location. Explication : plutôt que d'acheter un produit et de le jeter en fin de vie, provoquant ainsi gaspillage et perte financière, le client serait locataire de celui-ci, et pourrait demander à le faire remplacer "quand bon lui semble". Les industriels du revêtement de sol, comme certains spécialistes du faux-plafond, ont déjà adopté une démarche similaire en récupérant les dalles usagées pour les réintroduire dans le cycle de production. Mais là aussi certains obstacles s'interposent, comme la réglementation européenne qui petit à petit proscrit certains plastifiants contenus dans les dalles. Même problématique chez Desso : l'industriel collecte les moquettesen fin de vie, sauf celles avec des sous-couches PVC. Comme toute démarche écologique, le C2C a donc aussi ses limites. A nous tous de trouver comment les contourner.

 Récemment traduit en Français, l'ouvrage « Cradle to Cradle » de l'architecte William McDonough et du scientifique Michael Braungart explique comment il serait possible de "créer et recycler à l'infini". A travers des exemples concrets, des retours d'expériences vécues dans le monde de l'industrie comme celui de l'architecture bioclimatique, les deux auteurs ouvrent la voie à une nouvelle approche du capitalisme. Aux éditions Alternatives, collection Manifestô, 230 pages, 15€

Laurent Perrin

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