Terra Firma avale pour 7 mds EUR le numéro un de l'immobilier allemand
EON empoche au passage une confortable plus-value de 2,4 mds EUR. Le portefeuille de 138.000 logements gérés par Viterra était évalué à seulement 5,6 mds EUR fin 2004, selon ses propres indications. Le groupe a du coup relevé sa prévision de bénéfice net annuel, attendu désormais nettement au dessus du niveau de 2004, alors qu'auparavant un recul n'était pas exclu.
Le groupe de Rhénanie du nord-Westphalie (ouest) avait fait monter les enchères en assurant jusqu'à la dernière minute n'avoir pas tranché entre une mise en Bourse de sa filiale ou une vente en bloc à un investisseur. Le choix de la deuxième option confirme l'appétit insatiable des fonds d'investissements anglo-saxons pour le marché immobilier allemand. L'an passé, ils avaient ainsi conclu une série d'achats dépassant souvent le milliard d'euros.
Parmi les plus remarqués, celui pour 3,7 mds EUR d'appartements de la caisse de retraite publique BfA par l'américain Fortress, ou celui pour 2,1 mds EUR de logements ouvriers du groupe industriel Thyssenkrupp par la banque américaine Morgan Stanley alliée au groupe immobilier allemand Corpus.
Le secteur est pourtant morose depuis la réunification du pays en 1990: les loyers baissent, les locaux restent vides. Mais du coup, il est sous-évalué comparé à d'autres pays européens. Une bonne affaire pour les fonds, surtout qu'une revente ultérieure aux locataires peut offrir des perspectives intéressantes dans un pays où seulement 2 ménages sur 5 possèdent leur logement, selon l'Office des statistiques, à comparer avec 2 sur 3 aux Etats-Unis.
A cinq jours d'élections régionales en Rhénanie du nord-Westphalie, les modalités de la cession de Viterra risquent de peser politiquement alors que le parti social-démocrate (SPD) du chancelier Gerhard Schröder est parti en guerre contre les fonds d'investissement pour tenter de combler son retard dans les sondages.
Le président du SPD, Franz Müntefering, a été jusqu'à les comparer à une nuée de sauterelles, initiant un débat dans le pays sur les dérives du capitalisme grâce auquel le SPD espère se maintenir dans un Etat régional constituant un de ses bastions historiques.
Comme pour confirmer ce virage à gauche, Berlin depuis multiplie les annonces. La semaine passée, dans le sillage d'un putsch à la Bourse de Francfort dont le patron avait été contraint de démissionner sous la pression des fonds, le gouvernement avait commencé à étudier les moyens de renforcer le contrôle sur les fonds spéculatifs... qu'il avait pourtant été le premier à autoriser en Allemagne il y a un peu plus d'un an.
Et mercredi, il doit adopter en conseil des ministres un projet de loi obligeant les sociétés cotées à publier les rémunérations détaillées des patrons, accusés de s'octroyer des émoluments exorbitants quand ils exigent des salariés, sous la menace de délocalisations ou de suppressions d'emplois, des efforts sur les salaires ou le temps de travail.