Japon/éboulements meurtriers: un fléau négligé qui peut-être maîtrisé
Environ la moitié des 6.434 morts du terrible tremblement de terre de Kobé (ouest du Japon) en 1995 est attribuable aux éboulements qui ont suivi la secousse, témoigne Kyoji Sassa, de l'Université de Kyoto. "On connaît bien toutes les catastrophes meurtrières comme les séismes, les éruptions volcaniques ou les cyclones. Mais ignore que les glissements de terrain qui leur succèdent sont souvent davantage meurtriers", déplore Janos Bogardi, directeur de l'Institut des Nations unies pour l'environnement et la sécurité humaine à Bonn.
Mais, contrairement aux catastrophes naturelles qui peuvent frapper à tout instant, il est possible de sauver des vies en cas d'affaissement de terrain si l'on renonce à construire dans des zones à risque ou en procédant, en cas de danger imminent, à des évacuations.
"Personne ne peut prévoir un séisme mais une surveillance active des glissements de terrain et des systèmes d'alerte peuvent vraiment aider à sauver des vies", plaide Srikantha Herath, expert à l'Université de l'ONU de Tokyo.
Les récents dérèglements climatiques, à l'origine de cyclones dévastateurs en 2005, ont par ailleurs ramolli les sols et les ont rendus encore plus vulnérables aux éboulements. Ainsi, un brusque changement de climat pourrait être à l'origine de l'effondrement d'une falaise au Yémen, qui a coûté la vie à 65 personnes le mois dernier.
L'expansion urbaine tentaculaire dans les pays en développement menace en outre un nombre croissant de populations, notamment en Amérique latine, dans les "favelas", ces bidonvilles surpeuplés construits sur des pentes en dehors des grandes agglomérations. "Si nous ne faisons rien pour les personnes menacées, je crains fort que nous ne soyons confrontés à une détérioration de la situation dans les prochaines décennies", prévient M. Bogardi.
Les conférenciers souhaitent progresser en matière de coordination internationale afin de maîtriser les dégâts causés par les glissements de terrain. La rencontre de Tokyo vise également à la création d'un réseau international de chercheurs spécialisés dans ce phénomène qui sera basé à l'Université de Kyoto (ouest du Japon).
Les glissements de terrain menacent aussi des sites classés au patrimoine mondial de l'UNESCO, telle que la citadelle inca du Machu Picchu, selon les experts. En 2001, à la suite d'une série de légers affaissements, le Machu Picchu était menacé d'effondrement. Aujourd'hui, le site doit toujours être surveillé, assure le professeur Sassa. Parmi les autres édifices historiques en danger, figurent notamment le palais Huaqing construit au VIIe siècle près de Xian (nord-ouest de la Chine) ou la Vallée des rois en Egypte.
Les scientifiques arrivent de mieux en mieux à prévoir les glissements de terrain par le biais de modèles mathématiques prenant en compte la pluviométrie et la saturation des sols, se félicite le professeur Herath. Seuls des pays riches comme le Japon ont les moyens de consolider les terrains pour éviter les affaissements, mais ils peuvent néanmoins partager leurs connaissances pour prévenir des catastrophes dans les pays plus démunis, ajoute M. Herath.