AfSud: Johannesburg veut changer ses bidonvilles en logements dignes de ce
33 ans, est l'une des quelque sept millions de Sud-Africains qui vivent dans un bidonville, privés d'eau potable, d'assainissement, de routes asphaltées, de maisons dignes de ce nom.
"C'est une question de dignité (...) Si les besoins de base des gens sont satisfaits, leur dignité d'êtres humains s'améliore", estime le porte-parole de la municipalité, Nthatisi Modingoane.
Diepsloot, dans la banlieue nord, est l'un de ces bidonvilles ou camps de squatters où s'agglutinent des bicoques faites de matériaux de récupération, le long de pistes en terre rouge.
Depuis quatre ans, Thabiso Mahowa vit dans une baraque de deux pièces avec son mari Gotlieb, chauffeur de camion, et leur bébé de 11 mois, Gotlieb Jr.
"Les choses se sont améliorées, mais les eaux sales débordent toujours dans les rues", explique-t-elle.
"Il fait froid cet hiver et comme mon bébé est né prématuré, je ne peux pas utiliser le poêle à paraffine pour chauffer la maison. Nous devons entasser les couvertures", ajoute la jeune mère.
A l'instar de nombreux habitants de Diepsloot, elle a été attirée à Johannesburg par la perspective de décrocher un emploi de domestique dans les quartiers aisés, la plupart encore essentiellement habités par des Blancs.
"Ce que je crains le plus, c'est un incendie (...) Si les cabanes alentour prennent feu, nous mourrons car il n'y a pas moyen de s'échapper", lâche-t-elle en serrant son bébé dans ses bras.
Un pompier, habitué des lieux, précise que l'enchevêtrement des masures rend en effet les manoeuvres des camions-citernes délicates et les habitants manifestent souvent leur nervosité en jetant des pierres contre les soldats du feu.
Selon M. Modingoane, ce problème est le plus urgent à régler si Johannesburg veut réussir à transformer ses 189 camps de squatters en quartiers de logements modestes d'ici 2007.
"Nous devons construire de vrais accès routiers dans ces zones si nous voulons les normaliser", a ajouté le porte-parole de la municipalité.
L'approvisionnement en eau et en électricité, l'assainissement sont aussi au programme, ainsi que la construction d'écoles, de dispensaires médicaux et de centres de loisirs.
Mais l'urbaniste Marie Huchzermeyer de l'Université de Witswatersrand à Johannesburg doute que cet objectif soit atteint dans le délai fixé.
"Il est impossible d'améliorer tous les bidonvilles, de construire des accès d'urgence et un réseau d'eau et d'assainissement en trois ans", estime-t-elle.
Selon elle, au moins cinq ans seront nécessaires ne serait-ce que pour parvenir à un accord avec les habitants sur les services nécessaires, et sur le déplacement de certains afin de libérer des espaces pour construire routes et logements.
Le président sud-africain Thabo Mbeki a fait de la lutte contre la pauvreté l'une des priorités de son gouvernement.
Environ 7,2 millions des quelque 45 millions de Sud-Africains vivent dans 1,8 million de squats, dont au moins 500.000 dans la province du Gauteng, la plus prospère du pays, où se trouvent Johannesburg et Pretoria, selon des statistiques officielles.
Le barbier de Diepsloot, Lucas Makhura, 41 ans, précise cependant qu'il n'a pas envie de quitter un quartier qu'il a fait sien depuis huit ans.
"Nous voulons rester ici, explique-t-il. Nous avons déjà été délogés d'Alexandra --un township noir de la banlieue nord-- et ne voulons plus bouger."