La réunification allemande est aussi celle des fleuves et des canaux. L’ouverture du pont canal géant de Magdebourg offre à l’Allemagne le plus grand réseau de transport fluvial d’Europe.
Le plus ambitieux projet allemand de navigation fluviale est aussi le symbole de la réunification définitive entre les deux Allemagne. A Magdebourg (Saxe-Anhalt) le ministre Allemand des transports vient en effet d’inaugurer un pont canal géant franchissant l’Elbe. Cet ouvrage permettra au pays de quadrupler ses échanges fluviaux avec la Pologne et d’augmenter son trafic marchandise de 65%. L’effort est remarquable. Il aura en effet fallu plus de cinq ans de travaux et 510 millions d’euros pour réunir d’un trait majestueux et liquide de 920 mètres le Mittelandkanal à l’ouest et le canal Elbe Havel à l’est. Avec une largeur de 34 mètres, une profondeur de 4,25 mètres et un volume porté de 132 000 tonnes d’eau, l’ouvrage en lui-même, est une véritable prouesse technique. Les péniches à gros gabarit, dont la charge atteint les 3500 tonnes et le tirant d’eau 2,5 mètres, pourront désormais relier la Ruhr à Berlin ou la Pologne au port d’Hambourg sans dépendre du débit de l’Elbe ou sans zigzaguer d’un canal à l’autre pour éviter les écluses obsolètes et les voies trop étroites. Au-delà même du réseau allemand, le pont canal ouvre également un nouveau passage entre les différentes républiques de l’Est et l’Union européenne. Pour situer l’enjeu, il faut savoir que chaque année plus de 22 millions de tonnes de marchandises venant de la Ruhr s’arrêtaient jusqu’alors à Magdebourg avant d’être transférées par la route ou le fer. A lui seul, le trafic avec la Pologne, limité jusque-là à 2 millions de tonnes par an, devrait atteindre rapidement 6,4 millions de tonnes. La construction de ce pont canal s’inscrit dans un vaste plan de restructuration des transports fluviaux dont l’investissement est de l’ordre de 2,3 milliards d’euros. L’Allemagne, comme ses voisins les Pays Bas, la Belgique ou encore la Pologne s’est engagée dans une course au développement des voies navigables. Un secteur qui connaît, à l’heure où le trafic routier atteint ses limites et où le ferroutage peine à se mettre en place, un essor exceptionnel. Seule la France dont le canal Rhin Rhône n’en finit pas de jouer les serpents de mer, reste à l’écart d’un développement dont l’avenir et l’utilité ne sont plus à démontrer. Le trafic fluvial est aujourd’hui reconnu comme une clé stratégique dans les futurs échanges avec les nouveaux membres de la Communauté européenne. Un défi que les lobbys français de la route et du rail ont jusque-là, avec succès, réussi à écarter.