Le vitrail contemporain s'expose à la Cité de l’architecture et du patrimoine
Parier sur le génie sans la foi
Tout commence quand la Seconde Guerre mondiale laisse un énorme patrimoine dévasté à reconstruire. Cet immense chantier bouleverse par son importance les traditions séculaires. Des artistes non chrétiens sont sollicités et les premiers vitraux non figuratifs apparaissent. Le père Couturier, un dominicain cofondateur de la revue « L’Art sacré » illustre bien par ses propos le renouveau de l’époque : « Il vaut mieux parier sur le génie sans la foi, dit-il, que sur un croyant sans talent. » L’art sacré du vitrail rejoint l’expression du profane. Le Corbusier travaille sur la chapelle de Ronchamp, Matisse sur celle de Vence. Nous sommes dans les années 50 et la modernité gagne aussi la technique. C’est l’âge d’or de la dalle de verre, ces pièces de verre moulées, épaisses, translucides et maintenues dans du ciment armé. Les artistes Bazaine et Léger donnent ses lettres de noblesse à cette technique née dans les années trente qui contribue, par la simplification des formes, à la diffusion de l’abstraction dans l’art sacré.La Cité de l’architecture et du patrimoine nous fait ensuite revivre des moments charnières de l’histoire du vitrail. En 1955, la cathédrale de Metz est le premier édifice classé au titre des Monuments historiques à recevoir des vitraux d’avant-gardes – par Bissière, Villon et Chagall. A Nevers, il s’agit de remplacer les dégâts causés par les bombardements sur la cathédrale Saint-Cyr-et-Sainte-Julitte. Avec 1052 mètres carrés, c’est le plus grand chantier de vitraux contemporains d’Europe. Cinq artistes majeurs – Ubac, Alberola, Viallat, Rouan, Honegger – vont travailler sur ce chantier exceptionnel et vont poser les questions que soulève la relation entre l’art contemporain et le sacré.
De l’abstraction à la figuration revisitée
Alors, quel avenir pour le vitrail ? L’architecture sacrée ne serait-elle plus un domaine exclusif ? C’est ce que montre une petite partie de l’exposition qui est consacrée à l’actualité du vitrail de nos jours. Avec la raréfaction de la commande, les artistes de la lumière et du verre s’expriment désormais dans les monuments publics et les édifices privés. Le visiteur découvre par exemple des témoignages qu’il n’attendrait pas dans l’architecture d’un parking municipal, d’un gymnase ou d’un immeuble d’habitations à loyers modérés. Et les commissaires de l’exposition, Véronique David et Laurence de Finance, de conclure : « Les ressources et les combinaisons offertes sont infinies et cet art monumental n’a pas dit son dernier mot. »
T.C.
Informations pratiques :
« Chagall, Soulages, Benzaken…Le vitrail contemporain », exposition jusqu’au 21 septembre 2015. Cité de l’architecture et du patrimoine, 1 place du Trocadéro, Paris 16e. Ouvert tous les jours, sauf le mardi, de 11h00 à 19h00 (le jeudi jusqu’à 21h00). Plein tarif : 5€ - TR : 3€