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Le Japon se remet à peine de la folie immobilière des années 80

Publié le 21 juin 2005

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L'économie du Japon porte encore les séquelles de l'éclatement en 1990 de la bulle spéculative immobilière, qui avait gravement ébranlé le système bancaire du pays et plongé l'Archipel dans une "décennie perdue" de marasme économique.
L'éclatement de la bulle, caractérisée par une spéculation immobilière et boursière aveugle, a laissé des traces profondes. "Le Japon a souffert d'une longue période de stagnation économique, d'augmentation du chômage et de faillites. Les gens ont perdu confiance dans leur propre économie", reconnaissait récemment le Premier ministre Junichiro Koizumi.

Un vent de délire avait soufflé sur le marché immobilier nippon dans les années 1980, avec des prix multipliés par trois en quelques années. "Le marché était soutenu par le mythe de la hausse éternelle des prix", explique l'économiste Dai Higashino.

"Au milieu des années 80, un montant massif de capitaux ont été placés sur le marché immobilier à cause de l'excès de liquidités dû au yen fort et aux taux d'intérêt extrêmement bas", poursuit M. Higashino. Pendant ces folles années, banques et sociétés de crédit immobilier --les fameuses "jusens" aujourd'hui liquidées-- prêtent à tour de bras et sans guère prendre de précautions aux acheteurs avides de profiter de la flambée du prix du mètre carré (qui avait par exemple doublé à Tokyo en 1986).

Puis, en 1990, la Banque du Japon et le gouvernement décident de crever l'abcès, l'une en augmentant les taux d'intérêt et l'autre les taxes foncières. S'ensuit une débandade générale qui s'accompagne de l'éclatement d'une autre bulle, boursière. En quelques mois, l'indice Nikkei passe de près 40.000 points à 20.000 points, et les prix immobiliers dégringolent vertigineusement.

Les mesures pour stopper la spéculation immobilière "auront certes réussi à faire baisser les prix fonciers. Mais elles ont sévèrement endommagé l'économie japonaise en dévastant les finances des ménages et les bilans des entreprises, et en entraînant une accumulation des mauvaises créances chez les banques", juge M. Higashino.

Outre les créances irrécupérables laissées par les promoteurs et les "jusens" en faillite, les banques souffrent de la dégradation générale de la valeur des biens immobiliers, qui servent souvent de garantie aux prêts. Les créances douteuses enflent tout au long de la décennie 1990, et atteignent un pic de 34.000 milliards de yens (257 milliards d'euros) en 2001.

Forcées de passer des provisions massives et d'appeler à l'aide le gouvernement pour échapper à la faillite, les banques se révèlent incapables d'accorder de nouveaux crédits même à des sociétés saines. Nombre d'économistes voient dans ce phénomène une des principales explications de la stagnation prolongée de l'économie nippone pendant les années 1990.

Les grandes banques japonaises n'ont recouvré la santé qu'en 2005, avec un ratio de créances douteuses ramené à 2,9% contre 8,4% en mars 2002. Les prix fonciers, quant à eux, continuent de chuter depuis quatorze ans (-5% en 2004) même s'ils tendent à augmenter légèrement à Tokyo.

Plusieurs grands chantiers privés, comme la construction du gigantesque complexe résidentiel et commercial de Roppongi Hills à Tokyo en 2003, ont donné un second souffle aux entreprises de construction, dont les bénéfices restent toutefois inférieurs de moitié à leur niveau des années 1980.

Et, alléchés par les prix des logements redevenus raisonnables, de plus en plus de banlieusards reviennent dans la capitale. "Le marché immobilier s'est clairement amélioré depuis deux ou trois ans.

La demande de logements et de commerces de qualité augmente, la population progresse et les loyers sont en hausse", note M. Higashino.

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