Débat sur le projet de barrage Nam Theun II au Laos
Nam Theun II au Laos, organisée mardi à Paris sous l'égide
de la Banque mondiale, a permis d'en préciser les engagements sociaux
et environnementaux mais ses aspects financiers sont restés flous. "Il
y a eu énormément d'études et d'engagements sur les aspects
sociaux et environnementaux du projet, et cette qualité est peu fréquente.
Mais il y a beaucoup moins d'informations sur les aspects économico-financiers",
a résumé à l'AFP l'ex-ministre française de l'Environnement
Corinne Lepage, modératrice de la réunion à la demande
de la Banque mondiale.
La réunion de Paris s'inscrit dans le cadre d'une campagne mondiale d'information, organisée par la Banque mondiale, pour vaincre les réticences des détracteurs de ce projet retardé depuis 1993. Des inquiétudes concernent notamment l'impact social et l'avenir des quelque 6.000 personnes qui seront déplacées des futures zones inondées, la rationalité économique du projet et ses effets sur la biodiversité d'une zone protégée. Le barrage, à quelque 250 kilomètres au sud-est de la capitale du Laos, Vientiane, doit fournir de l'électricité à 17 provinces thaïlandaises à partir de 2009 et représente 1,3 milliard de dollars d'investissements.
Mais les revenus qu'il devrait procurer au Laos, et dont le gouvernement a assuré qu'ils iraient à l'éradication de la pauvreté, soulèvent des doutes. "Sur les chiffres, beaucoup de nos questions sont restées sans réponse. Il y a deux ans, on parlait de 250 millions de dollars par an pendant 25 ans, et maintenant c'est 80 millions", a déclaré à l'AFP Vanida Thephsouvanh, du Mouvement lao pour les droits de l'homme. "Les revenus nets devraient être de 25 millions par an", a déclaré à l'AFP Christian Delvoie, directeur de la Banque mondiale pour les Infrastructures, ce qui représente selon lui 5% des recettes annuelles du gouvernement lao.
"Ce barrage n'est pas une poule aux oeufs d'or, ce n'est pas un remède miracle", a-t-il ajouté. Le Laos, doté d'un régime communiste à parti unique, est un des pays les plus pauvres du monde. Tout en estimant que "le gouvernement du Laos a accepté de se prêter à ce jeu (des questions posées par des ONG), qui pour lui n'est pas facile", Mme Lepage a regretté n'avoir pu obtenir "aucune information sur la dette du pays, et la part du PIB au service de cette dette", alors que le projet reposera essentiellement sur un prêt de la Banque mondiale qu'il faudra rembourser.
En revanche, le consortium privé franco-lao-thaïlandais qui construira le barrage a pris des engagements sociaux et environnementaux que beaucoup d'intervenants ont salué, notamment pour maintenir le niveau de vie futur des personnes qui seront déplacées. "Il s'agit d'un changement complet de mentalités par rapport aux grands projets de barrages des années 1970", a convenu M. Delvoie. "Il faudra qu'une attention aussi grande soit portée à l'avenir pour savoir si les engagements pris aujourd'hui seront tenus", a ajouté Mme Lepage. Le représentant du Laos a affirmé que le projet était "une opportunité unique pour éradiquer la pauvreté et mettre notre pays sur le bon chemin"