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De Moscou à Pékin, le grand ballottage des expulsés

Publié le 16 juin 2004

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En Russie comme en Chine, entre capitalisme et communisme, lorsqu’il s’agit d’immobilier, les dirigeants ne savent plus à quelle idéologie se vouer. Alors qu’à Pékin le gouvernement tente de sauver des griffes des promoteurs la population, à Moscou, la Douma veut mettre fin aux logements gratuits...
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En matière d'immobilier, comme dans bien d'autres domaines de l'économie, la Chine cherche désespérément sa voie. Après avoir ouvert leur porte à l'économie de marché et suscités l'émergence des promoteurs, les gouvernants se voient désormais obligés de freiner la fièvre de la construction qui a gagné toutes les grandes cités du pays. Le gouvernement part en effet en croisade contre les expulsions des citadins qui, par centaines de milliers, sont chassés manu militari afin de laisser la place à des projets immobiliers, souvent démesurés. Dans ce contexte ce ne sont pas les promoteurs qui sont dans le collimateur du gouvernement mais plutôt les fonctionnaires locaux. Dans un pays où ces derniers disposent souvent d'un droit divin sur la population, ils forment, dans bien des cas, des bataillons d'expulseurs au service des promoteurs, et se montrent parfaitement indifférents aux droits qu'ils sont chargés de faire respecter. Une vague de limogeages, partie de Pékin, tente donc de faire le ménage dans de sulfureuses expulsions qui tournent souvent au pugilat, comme ce fut le cas récemment à Xi'an, au nord de Pékin. Dans ce quartier de la capitale, des hommes de mains payés par les autorités se sont violemment affrontés à la population qu'ils voulaient chasser. D'autres cas sont quotidiennement rapportés par la presse comme celui du district de Jiahe dans la province du Hunan. Cinq fonctionnaires viennent d'y être limogés par le parti communiste pour avoir expulsé sans aucun dédommagement onze familles afin de construire un centre commercial.

Le problème a pris des proportions suffisantes pour que le premier ministre Wen Jiabao lui-même s'en mêle. En effet, les dérapages de ce type, dans un pays de 1,5 milliard d'habitants, peuvent prendre des proportions considérables. Outre la surchauffe de l'économie et la multiplication des projets non rentables, c'est la production céréalière qui risque carrément de disparaître à la périphérie des villes, laissant la place à des mégalopoles anarchiques et jetant sur les routes des populations complètement désoeuvrées.

La Russie de son coté fait le chemin inverse. La Douma, chambre basse du Parlement russe, a en effet voté jeudi en première lecture un nouveau Code de l'immobilier qui doit mettre fin au système soviétique de distribution gratuite pour tous d'un logement d'Etat et en limiter l'octroi aux seules catégories les plus défavorisées. Le nouveau Code doit remplacer celui qui fonctionnait depuis 1983 et permettait théoriquement à tout citoyen de se voir octroyer gratuitement un logement. Là aussi le problème fait bouger les foules car cette décision est loin d'être attendue par la population. Selon le ministre de l'Industrie Viktor Khristenko, actuellement plus de 4,5 millions de familles attendent entre 15 et 20 ans pour obtenir un appartement octroyé par l'Etat et plus de 14 millions de familles russes vivent dans des immeubles vétustes ou insalubres. Entre celles qui attendent un logement et celles qui vont en être expulsées la situation risque fort de virer au rouge.

L'affaire est paradoxale, car en effet, si l'on freine l'expulsion en Chine, on la met en oeuvre en Russie. En tout état de cause à Moscou comme à Pékin, les expulsions massives ont de quoi faire regretter à plus d'un Russe ou d'un Chinois les belles heures du communisme.

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