La Commission européenne vient d’adopter la liste des grands travaux européens qui seront lancés dans les 3 ans à venir. A l’exception de quelques grands chantiers, Bruxelles focalise largement son effort sur le rail.
Après avoir présenté en octobre aux chefs des états membres une série de 29 grands projets d’infrastructures de transports à lancer dans les 3 ans et à réaliser d’ici 2020, la Commission vient définitivement d’arrêter la liste qui devra être entérinée en décembre par les 15 états membres. Pour Bruxelles, les 20 premières années du siècle seront celles d’un immense redéploiement de l’Europe du rail. La Commission se refuse cependant à s’engager dans le financement de projets complets. Elle a donc extrait des 29 projets sélectionnés 26 tronçons portant sur 16 grands axes transfrontaliers. En effet, pour éviter un inextricable casse tête politique, Bruxelles n’interviendra, à de rares exceptions près, que sur les parties transfrontalières de ces projets, plaçant ainsi chaque état devant l’obligation de financer les travaux propres à son territoire. Une méthode permettant d’emblée de faire sauter les éventuels verrous entre états. Dans ce gigantesque programme, la France, plaque tournante d’une Europe élargie, est bien servie : sur le trajet ferroviaire Lyon-Turin, prolongé dans la foulée jusqu’en Ukraine, l’Europe assurera pour 6,1 milliards d’euros le percement du tunnel du Mont Cenis et le tronçon allant de Budapest à Ljubljana. Sur les lignes TGV du Sud-Europe, elle financera les tronçons Figeras-Perpignan et Lisbonne-Porto-Madrid pour un montant de 6,65 milliards d’euros. A l’Est, elle interviendra sur la ligne Strasbourg-Appenweir notamment pour la construction du pont de Kehl à la frontière allemande avec un investissement de 150 millions d’euros. Le financement européen portera également sur la nouvelle ligne Dijon-Mulhouse-Mülheim, avec le tronçon Bâle-Karlsruhe et sur celui de Rheidt-Anvers sur une ligne nouvelle allant de Lyon à Rotterdam. La commission interviendra également sur d’autres lignes dont la France devrait indirectement tirer profit. C’est le cas du TGV Paris-Cologne pour le tronçon Liège-Cologne (1,186 milliard d’euros) ou les tronçons Munich-Salzbourg et Vienne-Bratislava sur une nouvelle ligne qui verra le jour entre Paris et Bratislava. Les autres projets touchent pour l’essentiel les pays de l’Europe du sud, le tunnel du Brenner entre l’Autriche et l’Italie ( 4,3 milliards d’euros) et des projets rail-routes dans les pays scandinaves, la Grèce, le Royaume uni, et la Bulgarie. En marge des infrastructures de transports, la Commission a confirmé sa participation dans les domaines de pointes tels que les nanotechnologies, l’hydrogène dans le secteur énergétique, la nouvelle génération de laser, le projet de navigation par satellite Galiléo et le réaménagement entre 2004 et 2005 de la base de Kourou en Guyane afin qu’elle puisse lancer les fusées russes Soyouz. Sur les 220 milliards d’euros d’estimation global des 29 projets concernés, l’engagement européen porte actuellement sur plus de 45 milliards d’euros. L’argent n’est pas dans les caisses et la problématique des financements risque d’être délicate. La Banque Européenne d’Investissement (BEI) devrait être largement mise à contribution dans un contexte ou Bruxelles mène une lutte sévère contre les dérives d’endettement des états. Au-delà des potentiels de développement que ces grands projets induisent, la commission européenne ne cache pas que ces grands chantiers devraient avoir un effet puissant de dopage de l’économie des quinze. Délaissant un ciel saturé, et des autoroutes jugées non grata pour cause d’écologie, le programme de la Commission Européenne réinvente une Europe du rail telle qu’elle était rêvée au XIXème siècle. En attendant, avant d’offrir aux européens les nouvelles clés de leur territoire, ces ambitieuses perspectives devraient durant les 20 années à venir largement profiter aux acteurs du BTP.