Olivier Lemaître : Les services de la Ville de Paris avaient monté une première exposition contenant de petites séquences que j'avais réalisées. J'ai ensuite été contacté par l'émission "Des Racines et de Ailes", qui préparait fin 2008 un sujet de 26 minutes. Aujourd'hui, je travaille à relever le défi de la Haute-Définition (HD) car la plupart des documentaires utilisent des textures en basse-définition.

Comment travaillez-vous en amont afin de réaliser de telles images ?

Il y un important travail de documentation, je rencontre des archéologues, visite des musées... Je me sers d'un appareil photo HD pour les textures. Je réalise des voyages, en Méditerranée notamment, pour proposer des images crédibles avec des effets de fumée, une atmosphère, et des impressions de l'intérieur des maisons. Je m'appuie aussi sur des documents pour faire la différence et être le plus proche possible de l'aspect historique.

Quelles sont les autres usages que l'on peut faire de vos images ?

J'ai eu par exemple une commande du magazine Science & Vie qui avec seulement quelques retouches peut, à partir de mes images HD, les utiliser en pleines pages pour son magazine. Il m'arrive aussi de faire de la 3D immersive, avec des vues sphériques dans lesquelles on peut se balader par un applet java. Cela me permet de réaliser des DVD-rom pédagogiques, support pour les professeurs avec en bonus des interviews et des objets en 3D à manipuler. Je propose aussi mes images à différents musées.

Quel sera le thème de ces DVD-rom pédagogiques en 3D ?

C'est une série sur l'histoire de Paris. Le premier épisode "Paris Antique" va de –52 avant JC, la prise de Lutèce par les Romains, jusqu'au 4ème siècle. La technique que j'utilise consiste à chercher sur des vues actuelles de Paris l'emplacement des monuments. C'est plus frappant pour les habitués de Paris qui réalisent les monuments qu'ils foulent. Le Quick rue Soufflot par exemple repose sur un ancien temple. Ça sentait donc déjà la viande grillée à l'époque !

Quels sont vos autres projets de reportages avec de la 3D ?

Je travaille actuellement à un projet sur la civilisation minoenne. C'est la première première civilisation européenne ayant disparue à la fin de la préhistoire. Elle est attachée à beaucoup de légendes : Zeus, le Minotaure... Cette civilisation était basée sur l'île de Crète et comportait de nombreux palais. Je dois notamment reconstituer des paysages de ces anciens sites historiques mal connus des Français. Je travaille avec l'aide de la télévision grecque sur ce projet qui prend l'angle du mythe de l'Atlantide : la disparition d'une civilisation entière due à l'explosion d'un grand volcan à quelques kilomètres de là. C'est surtout un prétexte pour intéresser le grand public à cette culture.

Les soutiens sont-ils plus rares en France pour ce genre de projets ?

Il est en effet très long de convaincre les chaînes françaises. C'est dommages car nous avons en France beaucoup de compétences en 3D. Avec le projet Lutèce, l'objectif est de faire un docu-fiction, de reconstituer le voyage d'un romain à qui il arrive des aventures dans la ville. Je réalise des décors en 3D et de véritables acteurs y évolueront. Il reste à convaincre un diffuseur hertzien, et avec la crise de l'audiovisuel public, les budgets ont fondu et c'est difficile. Les chaîne préfèrent acheter des documentaires déjà existant aux Allemands ou aux Anglais, à part certaines exceptions comme Arte ou l'émission "Des Racines et des Ailes".

Quel a été votre parcours pour en arriver à faire ce métier ?

J'ai suivi des études d'histoire et de science politique. A mon époque, les ordinateurs au lycée étaient réservés aux filières scientifiques. C'est plus tard, dans le secteur associatif que j'ai appris la 3D, en autodidacte. Si je devais conseiller les jeunes, je leur dirais de sortir des sentiers battus. Le geek doit sortir de sa chambre, aller voir des musées et avoir l'esprit observateur. Il ne faut pas se centrer que sur la technologie. Pour faire du documentaire, il faut inventer des solutions économiques originales. Pour ma part, je me suis spécialisé dans les civilisations disparues. Mon espoir est qu'il y ait plus de cases de diffusion de la culture et des nouvelles images en télévision.

Quels sont les outils que vous utilisez pour ces images 3D ?

Mes outils sont assez basiques : un PC et des logiciels, si possible libres, et le programme Blender pour les rendus. Pour modéliser des villes complètes, il y a beaucoup de solutions existantes. J'en cherche des gratuites. Pour la modélisation de ville et de paysages en 3D et en HD, je suis équipé d'un quad-core de 64 bits avec 8 Gigaoctets de ram (mémoire vive). La HD est très consommatrice. Pour le rendu je travaille avec une société qui sous-loue des racks de processeurs et de mémoire. Pour des plans de 30 ou 40 secondes, les calculs peuvent prendre plusieurs jours. Le temps de calcul n'a pas évolué aussi vite que les logiciels...

www.sequanamedia.com

Ci-dessous quelques images à paraître dans le prochain documentaire sur Lutèce :

La chambre

La cuisine

Le marché