Recentrage des aides : le marché de la maison individuelle accuse le coup
Le marché de la maison individuelle a été « touché de plein fouet par les mesures budgétaires de 2017 », a souligné ce jour LCA-FFB. Lors d’une conférence de presse, Patrick Vandromme a révélé des chiffres 2018 quelque peu moroses. Il a notamment indiqué qu’après deux années de croissance (+ 13,3% en 2015, puis + 20,6% en 2016) et une année de stabilisation (+ 1% en 2017), les ventes brutes de maisons individuelles en secteur diffus ont reculé de 11,3%, descendant sous la barre des 120 000 unités (119 700), soit 15 000 ventes de moins que l’année précédente.
« 15 300 maisons en moins, c’est quasiment une ville de 45 000 habitants que l’on n’a pas construite », a regretté Patrick Vandromme. « C'est trois emplois par maison construite. C’est donc également 45 000 emplois qui malheureusement n’ont pas été produits », a-t-il poursuivi. Ainsi, alors que 2017 représente le quatrième meilleur millésime, l’année 2018 constitue le quatrième moins bon exercice de ces quinze dernières années.
Tous les segments et régions concernés par la récession
Le secteur diffus n’est pas le seul à enregistrer une baisse de son activité. La maison individuelle en secteur groupé a également connu « un exercice 2018 très délicat ». A fin septembre 2018, les ventes ont baissé de 12,9% sur 12 mois glissants, pour s'établir à 9 534 unités. Les réservations ont chuté de 21,4% et les mises en vente de 29,9% par rapport au troisième trimestre 2017.
Le marché du collectif s’inscrit également à la baisse (- 1,6% sur 12 mois cumulés à fin septembre 2018, soit 118 652 unités) ; une tendance qui devrait se confirmer en ce début d’année, les réservations à la vente des appartements et les mises en vente ayant reculé respectivement de 7,8% et de 12,8% au troisième trimestre 2018.
Les abandons de projet de construction de logements collectifs sont « anormalement » élevés, a noté LCA-FFB. Fin 2018, le taux d’annulation moyen sur trois mois de logements collectifs, s’établit à 27,3%, soit 8 points au-dessus de sa moyenne de longue période.
La récession n’a épargné aucune région en 2018 alors même qu’en 2017, la moitié des territoires affichaient encore des taux positifs.
Tendance baissière, à qui la faute ?
Pour LCA-FFB, il ne fait aucun doute que cette baisse de l’activité se doit au recentrage des aides en faveur du logement. En effet, alors que toutes les conditions étaient réunies pour encourager les ménages à acheter (taux d’intérêt historiquement bas, allongement de la durée moyenne des prêts, assouplissement des modalités d’octroi, abaissement du taux minimum d’apport personnel), le rabotage du PTZ a considérablement freiné le marché de l’accession à la propriété.
Dans certaines zones, « la quotité du PTZ est passé de 40% à 20%, ce qui a augmenté les échéances des plus modestes », a souligné Patrick Vandromme. A cela s’est ajoutée, la suppression de l’APL Accession. C’est « 160 à 170 € en moins par mois » qui permettaient aux ménages « de rester sous la barre des 33% » de taux d’endettement.
Dominique Duperret, Délégué Général de LCA-FFB, a ajouté que le rabotage des aides était venu impacter le taux d’effort des ménages : un ménage a perdu 14 000 € d’enveloppe budgétaire en 2018, et risque d’en perdre 30 000 en 2020 en zone C. En B2, c’est 50 000 € de réduction d’enveloppe budgétaire. Pour les constructeurs, ce sont 9 000 logements neufs de perdus en zones B2 et 19 000 en zone C.
Défendre les aides pour redonner confiance aux ménages
Pour regagner la confiance des ménages et relancer l’activité, LCA-FFB estime indispensable de pérenniser le PTZ en zones B2 et C au-delà de fin 2019 et de rétablir l’APL Accession. En effet, si 2019 devrait être une année de stabilisation avec des ventes se situant entre – 3% et + 3%, soit entre 116 000 et 123 000 unités, « sans nouvelles mesures », 2020 pourrait bien être l’année « de tous les dangers », avec une baisse de – 20% des prises de commande.
A la question, le PTZ coûte-t-il cher, l’association répond, « non ». L’économie réalisée par la réforme du PTZ par la loi de Finances pour 2018 devrait ressortir à 700 millions d’euros auxquels s’ajoutent 50 millions d’euros pour l’APL Accession. « Si l’on considère 28 000 opérations neuves de perdues en zones B2 et C au prix moyen de 172 200 € TTC, la perte de TVA pour l’Etat s’élève à 803 millions d’euros », sans compter les autres recettes fiscales (impôts fonciers, droits de mutation, etc.) et les impacts économiques et sociaux sur l’emploi.
Christophe Boucaux, délégué général adjoint de LCA-FFB, trouve ainsi dommage de sacrifier « la solvabilité » et la confiance des ménages « pour une économie très modeste ».
Le choix de suppression des aides en zones B2 et C est également contradictoire lorsque l’on sait que le Gouvernement enchaine les campagnes pour « revitaliser les centres-villes ». En effet, le rabotage des aides pousse les ménages à renoncer à leur projet, à acquérir un logement « inconfortable » ou à s’éloigner. Selon LCA-FFB, cette « assignation à résidence » ne fera « que renforcer les fractures territoriales et le sentiment de déclassement de bon nombre de nos concitoyens ».
L’organisme plaide en outre pour la mise en place d’une politique foncière adaptée aux différents enjeux des territoires.
Rose Colombel
Photo de une : ©R.C