Le nouveau schéma d'aménagement de l’Île-de-France ne fait pas consensus
Comment vivront les 13 millions de Franciliens en 2030? Le schéma d'aménagement de l'Ile-de-France a pour ambition de rééquilibrer le territoire, historiquement fracturé entre l'est et l'ouest, tant en termes de logement que d'emploi, avec l'idée de rapprocher domicile et travail, de développer les transports en commun pour fluidifier les déplacements et si possible réduire l'utilisation de la voiture. L'Ile-de-France est la seule région à disposer d'un tel schéma directeur d'aménagement (Sdrif), un document qui s'impose désormais aux documents d'urbanisme des collectivités.
Inquiétudes générées par la future entité
Le dernier Sdrif date de 1994 et devait être revu en 2008. Or le projet du Grand Paris, voulu par Nicolas Sarkozy, en avait gelé la révision. Le projet "Île-de-France 2030" a une « ambition réformatrice : changer la vie des gens », a déclaré Jean-Paul Huchon, président (PS) de la région, qui voit là « la dernière ligne droite d'un combat politique de dix ans ». Des objectifs, parfois irréalistes aux yeux de l'opposition, ont été inscrits : la création de 28 000 emplois par an, reposant sur une prévision de croissance de 2,5% en moyenne; l'objectif de construction de 70 000 logements par an, dont 30% de logements sociaux alors que seulement 35.000 sortent de terre actuellement.
La séance exceptionnelle consacrée au Sdrif a commencé par l'examen de deux motions de rejets déposées par les groupes d'opposition UDI et UMP. Si ces deux motions ont été rejetées sans surprise, elles ont donné libre cours aux inquiétudes générées par la future entité, à gauche comme à droite, tant sur les compétences que les financements. Selon eux, il est absurde d'adopter un schéma directeur alors qu'un projet de loi créant une métropole du Grand Paris est encore au Parlement.
Cette décision risquerait de séparer la compétence en matière de logement (qui lui reviendrait) de celle des transports (de la région), intrinsèquement liées en Île-de-France. « Depuis six mois, votre gouvernement érige un mur contre ce Sdrif et nous ne voyons pas comment le contourner », a lancé Laurent Lafon (UDI). « On assassine le Sdrif en scindant en deux notre région », dit-il, « entre le centre, c'est-à-dire la métropole, et la grande couronne ».
Les terres agricoles mieux protégées
Côté transports, la Région promet une « révolution » pour le réseau actuel avec le doublement des voies de métro (construction des lignes du Grand Paris Express). A ce sujet, la chef de l'opposition Valérie Pécresse (UMP) est montée au créneau: « Le Sdrif repose sur un malentendu car toute l'architecture du projet (logements, emplois) se fonde sur le déploiement rapide du Grand Paris Express or tout porte à croire qu'il sera au mieux retardé, ou pire pas réalisé dans sa globalité ».
L'étalement urbain sera maîtrisé : deux tiers des nouveaux logements et équipements seront bâtis dans la ville déjà existante et un tiers en extension. Moins d'étalement permettra de protéger les espaces agricoles, en instaurant des limites urbaines intangibles. En effet, pour la première de son histoire, la région Île-de-France est en effet passée sous la barre symbolique des 50% de sa surface en terres agricoles. Actuellement, 1700 hectares de terres agricoles sont urbanisées chaque année. Avec le nouveau Sdrif, cette « consommation » sera limitée à 1300 ha.
Pour les écologistes d'EELV, « il est temps de prendre nos responsabilités et de se donner les moyens d'avancer ». Le Front de gauche (communiste), qui partage les inquiétudes de cette métropole faite par le haut, a plaidé pour un Sdrif point d'appui pour une autre gouvernance. Une motion, adoptée dans la foulée (PS, EELV, PRG-MUP, FDG pour, UDI abstention, UMP contre), « insiste sur le fait que la création de cette (métropole) se fasse dans le respect de l'ensemble des compétences de la région et préserve la totalité de ses moyens financiers ».
B.P (avec AFP)